Ah la Norvège, ses forêts à perte de vue, ses omelettes et le délicieux accent d'Eva Joly ("Je fé vous raconder une histoire Troll") ... Mais la Norvège c'est aussi «Trolljegeren» d'André Øvredal, péloche fantastique qui a réussi (ne nous demandez pas comment) à se frayer un chemin jusqu'aux salles obscures françaises au beau milieu de l'été. Bonne nouvelle pour les plagistes et les vacanciers, Universal organise une deuxième battue sur les terres arides de la vidéo le 29 novembre prochain. Ecranbis.com a enfilé sa tenue de camouflage et a aiguisé sa télécommande de survie toute la semaine...
Synopsis :
Armés d’une caméra vidéo, un groupe d’étudiants norvégiens se lance à la recherche de mystérieuses créatures qui sèment la pagaille dans la région. Durant leur traque, ils vont découvrir un mystérieux braconnier surnommé le « chasseur de Trolls »…
Critique :
C'est en 1999, alors qu'il est tranquillement assis dans le bureau d'une société de production pour laquelle il travaille que l'idée de «The Troll Hunter» vient à André Øvredal. Une idée parmi tant d'autres qui refera surface comme par magie six années plus tard. Il faut dire qu'entre temps, la démocratisation de l'imagerie numérique a permis aux réalisateurs, aussi jeunes et fauchés soient-il, de coucher sur la pellicule leurs rêves les plus fous. La production de «The Troll Hunter» ainsi rendue possible, Øvredal passe aux choses sérieuses en 2005 et commence à développer son concept. Il faudra bien sûr encore attendre quelques années avant que «TROLLJEGEREN» n'imprime les écrans norvégiens et ne devienne le succès commercial de la fin 2010. Coup de chance pour les cinévores de notre petit et obscur pays, le film est racheté par Universal qui lui offre un ticket pour l'exploitation en salle. L’effort d' André Øvredal nous est donc parvenu le 29 juillet dernier, après un détour par les sommets enneigés de Gerardmer, partageant (c'est le moins que l'on puisse dire) la presse spécialisée.
Il faut dire que «The Troll Hunter» joue la carte du faux documentaire retrouvé. Pirouette stylistique née de l'esprit tordu de l'Italien Ruggero Deodato, exercice souvent cache misère, devenu depuis «The Blair Witch Project» une véritable recette du cinéma fantastique. On pense donc très fort à la ballade forestière et nocturne que nous avait offert Daniel Myrick et Eduardo Sánchez il y a 12 ans (Dieu que le temps passe), tout comme à ses plus récents rejetons : Cloverfield et son gloumoute destructeur en tête. Autrement dit, réduit à son concept : Deux disques durs retrouvés contenant des centaines d'heures de rush, leurs auteurs disparus et la promesse d'une heure trente de cadrage sautillant : TROLLJEGEREN ne saurait allumer la moindre petite étincelle dans les yeux fatigués du fantasticovore compulsif.
Fort heureusement, «The Troll Hunter » est aussi un autre film et contre toute attente, un film de super héros. Mais oubliez les blondinets au corps svelte et les couillons en pyjama bleu rouge et jaune, notre surhomme du jour est un rustre psychorigide, un chasseur impassible et indifférent. Un charismatique héritier de l'art de vivre viking qui mange la camera au point de reléguer notre trois pauvres étudiants documentalistes au rang de faire valoir. Face à lui, une ancienne croyance populaire, des créatures géantes du folklore et de l'imaginaire scandinave, les trolls. André Øvredal aurait pu se contenter de son chasseur bourru fraichement descendu du drakkar, de ses monstres en images de synthèse, de son vrai-faux documentaire et laisser «TROLLJEGEREN» errer sans but dans les forêts du déjà-vu...
Mais notre homme semble décider à défricher quelques pistes supplémentaires, éclairé par une bonne dose d'humour noir. Ainsi, dans «The Troll Hunter», le gouvernement norvégien est depuis toujours au courant de l’existence des Trolls et tente d'en cacher les traces.(Ah l'exemple des démocraties libérales nord-européennes). Au fond, notre Hans des bois n'est pas un sauvage coupé du monde mais à l'instar de l'agent K dans «Men In Black», un fonctionnaire de l'ombre. Le rouage et l'outil d'une machination d'état. On nous cache tout, on ne nous dit rien et la vérité est ailleurs. Les fans d'X-files en auront pour leurs sous. On s'amusera également de voir nos créatures capables de renifler la transpiration (classe!) de chrétiens à des kilomètres lorsque l'on sait que les trolls ont été progressivement chassés des croyances populaires scandinaves par l'arrivée du christianisme. Quelle revanche cinématographique !
Bref, à moins de développer une allergie sérieuse aux faux reportages et aux vues subjectives, The Troll Hunter, en bonne petite péloche fantastique, mérite assurément un visionnage, une location ... allez soyons fous, un achat. (Ne faites plus d'économie, c'est la crise ! ) Quand on sait en plus que la chose n'a coûté que 2 millions de dollars à ses producteurs (et donne l'impression d'en avoir coûté 5 fois plus), on se dit que l'avenir du cinéma de genre, inventif, rafraichissant est peut être de notre côté de l'Atlantique. Allez 15/20 pour la route...
Test technique :
Aucune mauvaise surprise du côté de la galette argentée Universal qui permet de découvrir «The Troll Hunter» dans d'excellentes conditions techniques. (Format 1.85 , mixages audio DD5.1 français, allemand et norvégien). En bonus, un rayon suppléments plutôt bien achalandé avec un making of, des scènes coupées, des scènes allongées, un bêtisier et une galerie photo … Mais que demande le peuple ?