Slime City : Critique et test DVD


Substance maléfique par excellence, incarnation chimique et si possible fluorescente de l'horreur, le Slime s'est offert une place de choix dans l'imaginaire populaire. Passant du cinéma de quartier à la super production hollywoodienne, il ira (signe de digestion culturelle avancée) jusqu'à s'installer  dans les linéaires de magasins de jouets. Dès les années 70, on retrouvera en effet notre magma monstrueux dans des jeux de plateau, mais il ne connaîtra son heure de gloire commerciale que dans les années 80 avec le fabriquant Mattel qui utilise le concept dans sa gamme de figurines «Master of Universe». Au cinéma, le Slime apparaît véritablement en 1968 avec «The Green Slime» de Kinji Fukasaku. Il s'agit alors d'une substance verte venue d'outre espace, donnant naissance à des créatures peu fréquentables. Les origines de ce monstre sans corps et à priori  indescriptible sont non pas à chercher dans le «The Slime People» (1958) mais dans un classique de la série B américaine datant de la même année : The Blob  d' Irvin S. Yeaworth Jr.. Dans «Danger Planetaire» (son très catastrophique et tardif titre français), un fluide gluant et rougeâtre, prisonnier d'un météorite attaque une petit ville sous les yeux médusés d'un certain Steve Mc Queen débutant.



Dans les années 80, le Slime revient en force en jouant les seconds rôles dans le dyptique «SOS fantômes» d'Ivan Reitman. Ce dernier lui donnera d'ailleurs une taille et un rôle plus imposant dans sa comédie S.F. «Evolution». Même John Carpenter habillera son Prince of Darkness d'une robe  liquide et phosphorescente. Un pur chef d'oeuvre et sans doute le ou l'un des meilleurs efforts du maître. Mais critique de la société de consommation et nature catharsique du cinéma de genre oblige, une branche «alimentaire» de la créature n'a pas tardé à se passer de justification ecto-plasmique ou extra terrestre. The Stuff de Larry Cohen et son yaourt tueur ouvrent la voie en 1985, il sera suivit l'année suivante par la boisson explosive du Street Trash de Jim Muro ou encore dans les sacro saintes 90's par Body Melt. Si nous débutons cette chronique par un tour d'horizon du cinéma  qui coule et tâche, c'est tout simplement car le  Slime City de Gregory Lamberson part  thématiquement ou  «Slimifiquement»  dans tous les sens...



Appréciez  plutôt! Le jeune Alex, étudiant New Yorkais emménage dans un nouvel appartement en espérant convaincre rapidement sa petite amie Lori de venir le rejoindre. L'immeuble est un peu lugubre, mais la garçonnière est spacieuse et le voisinage, à première vue, sympathique. Il y a Roman, un poète en train de disparaître, deux vieilles concierges et surtout Nicole, punkette ultra sexy toujours au bord de la combustion spontanée. Un soir Roman invite Alex pour un repas pas comme les autres. A défaut de Pizza et de bière,  on lui propose une étrange crème colorée arrosée d'une boisson inconnue. Les effets sur Alex sont dévastateurs, il se réveille couvert d'une bave gélatineuse et collante. Mieux le jeune homme se transforme au fil des heures en une étrange créature démoniaque. Le seul moyen de freiner sa dégénération est de commettre l'irréparable. En assassinant sauvagement un clochard, Alex retrouve forme humaine. Mais  déjà accro  à cette danette diabolique,  il va devoir aller plus loin et découvrir par la même occasion que les résidents de l'immeuble cachent un terrible secret...



Que dire si ce n'est que dans ces 85 baveuses minutes, on brasse large!  le Slime y est de toutes les couleurs, recouvre la peau, coule de la tête, se crache par la bouche, suinte des mains, se déguste comme la crème tueuse de «The Stuff»... Il rend accro comme le ver du Brain Damage de Frank Henenlotter (bobine azimutée sur laquelle Gregory Lamberson sévira d'ailleurs en tant qu'assistant réalisateur).  Notre matière purulo-dégoûtante y est à la fois cause, conséquence et moyen. Bref voilà  un film qui porte décidément bien son titre...  et constitue  au moins autant  une synthèse de la thématique, que le parfait produit  d'une époque. Tourné avec peu de moyens, une équipe de bénévoles, le rejeton baveur  de Lamberson est aussi un bel exemple de la production cinématographique underground US. Un scénario fou écrit en deux jours, beaucoup de passion et un indiscutable sens du Trash. 25 ans après sa réalisation, la sauce prend étonnamment toujours. Le  Trash In USA  (Frankenhooker, Elmer, Street Trash... et Slime City) vieillit bien !



Il faut dire que le couple d' acteurs principaux, Robert C. Sabin (Alex) et Mary Huner (l'étonnant double rôle Nicole, Lori) tient la route. L'autre star du film , c'est bien entendu son petit déluge d'effets spéciaux dégoulinants et réussis. Pas de grande surprise, ils sont l'œuvre de Scott coulter, Dan Frye et Tom Lauten. Nos trois compères vont tous embrasser des carrières incroyables. Le premier va partir des profondeurs du cinéma bis (Street Trash, des production Charles Band) pour fonder sa propre société Worldwide Fx et ainsi travailler sur  The expendable 1 & 2 , John Rambo, Hell Driver... Le second contribuera aux effets et maquillages d'un nombre conséquent de péloches dont nous retiendrons pèle mêle: Harry potter, Resident Evil, Elmer le remue méninge, Prometheus, Dark Shadow, Shaun of the dead...  Enfin le troisième dévoilera ses talents dans un Freddy, le King Kong de Jackson, quelques efforts estampillés Empire Pictures et Troma.

Resté trop longtemps dans l'ombre de Street Trash, Brain damage et autre rejetons Trash Culte, Slime City se découvre en tout cas avec un vif plaisir. Un bel exemple du cinéma que l'on essaye modestement  de défendre dans nos colonnes numérique et un vrai petit coup de coeur... A découvrir !



Le disque :

Uncut movies propose de découvrir Slime City dans une édition collector limitée à 1000 exemplaires. Le film est présenté plein cadre avec une qualité moyenne mais acceptable si l'on considère la rareté du titre et sans doute l'absence de meilleur matériel disponible. Pas de  doublage français à l'horizon mais une piste anglais mono avec sous titres français débrayables.  En plus des traditionnelles bandes annonces de l'éditeur, vous pourrez visionner le trailer original du film , une galerie photo et un court mais très intéressant Making Of (un peu moins de 8 minutes). A commander sur le site d'Uncut : http://www.uncutmovies.fr/