L'un collabore à l'Ecran fantastique, l'autre à Mad Movies. La rencontre de Gilles Penso et Alexandre Poncet aurait pu virer au choc des titans, si les deux hommes ne s'étaient pas promis de remonter ensemble le fleuve de la poésie visuelle jusqu'à Ray Harryhausen. Deux journalistes à l’assaut du fan doc, un exercice devenu genre, un courant même, ruisselant entres des galets cinéphiliques de toutes formes. «Screaming in High Heels» de Jason Paul Collum (L'ascension et la chute des Scream queens dans l'industrie DTV des années 80) , The People Vs Georges Lucas (un pendant contestataire en quelque sorte) d'Alexandre O Phillipe, et désormais «Ray harryhausen, le titan des Effets spéciaux», quand les fans prennent la main... Une chronique de l'Ecranbis.com.
Après avoir accompagné un numéro de Mad Movies, en qualité de «sélection DVD du mois», le documentaire de Gilles Penso nous revient comme un boomerang dans une édition collector. L'objet du désir y gagne un second disque bonus, permettant au runtime de franchir la ligne des trois heures. Qu'on me pardonne cet abordage cavalier, ce saut de l'ange dans le vulgaire, mais j'aimerais commencer par écrire que le «consommateur» n'est pas volé et de poursuivre en disant que le montage de 93 minutes et le matériel qui lui est adjoint finissent par former un tout nécessaire. Dit autrement, si le premier disque ravira sans doute le néophyte par son dynamisme, le cinéphile, lui, épanchera sa curiosité et sa soif dans l'extra time... Ne dit-on pas que le bonheur est dans l'après?
On comprendra que le but poursuivi par Penso et Poncet tient à la fois de l'hommage et de l'idée d'établir une filiation entre Harryhausen et les artisans d'un cinéma plus actuel. En ce, les deux hommes ont profité de leur collaboration aux deux incontournables titres de la presse spécialisée française et n'en doutons pas de quelques «tournées promotionnelles» accompagnant les sorties de films, pour mettre en boite une série d'entretiens. Il va sans dire (mais non sans écrire) que les simples interventions de Peter Jackson, Tim Burton , Guillermo Del toro, Joe Dante, John Landis comme celle de James Cameron et Steven Spielberg donnent à cette aventure une certaine envergure. Conséquence directe, "Ray Harryhausen, le titan des effet spéciaux" tend les bras à un documentaire plus institutionnel pour ne pas dire adoubé. Profitons-en pour écarter une fois pour toute, ce qui semble être la limite de l’exercice. «Ray Harryhausen, le titan des effets spéciaux» de par sa nature compilatoire et par la place très particulière de l'artiste dans la culture populaire, est une éloge assumée. Trop sans doute. Comprendre que le concours de lancé de fleurs finit fatalement par échapper au subtil, par un simple effet de redondance, et à terme de trop plein. C'est d'ailleurs la seule réserve que je me risquerai d’émettre sur le travail accompli.
Ce voyage dans la carrière d'Harryhausen, une fois l'idée de la descendance établie, a l'immense mérite de lancer les bases d'une réflexion sur la place des effets spéciaux dans le cinéma, sur cette matérialisation visuelle et pelliculaire de l'imaginaire. Et voilà une formidable idée que de prendre les travaux d'Harryhausen comme point de départ, l'homme incarnant parfaitement les interactions du cinéma et de l'effet visuel. Sur le parquet de l'entertainment, qui mène la danse? Ce qui saute aux yeux dans le parcours du maître de la Stop Motion , c'est finalement l'inversion du rapport causal. La technique d'Harryhausen a littéralement commandé la mise en chantier d’œuvres, a mis le récit au service de sa nature spectaculaire. Tout comme l'affinement des images de synthèse a imposé Jurassic park , et finalement (au risque de me faire de nouveaux amis), la 3D et les techniques modernes de Motion capture ont nécessité Avatar, pardon un présentoir...
Il y a également dans ces 93 minutes , quelques chose qui tient de la nostalgie ou plutôt de la fascination qu'exerce sur nous le latex, l'animatronic, les maquettes, la stop motion alors que nous naviguons désormais sur l'océan du tout numérique. Comme si l'imagerie digitale, les fulgurances qu'elle autorise, l'industrie qu'elle implique ne parvenait pas à chasser de nos mémoires et de nos goûts, les effets de nos enfances et adolescences, leur irréalisme poétique, leur artisanat. Et lorsque le générique tombe, on finit par se dire qu'il y a sans doute ici matière à faire une bonne heure et demi de plus… Alors Messieurs Penso et Poncet, vous savez ce qui vous reste à faire ? On compte sur vous. Les cinévores en panne d'inspiration dans l'écriture de l'incontournable lettre au barbu qui se fringue en rouge, peuvent, eux, sans aucune retenue, ajouter ce très beau double DVD à leur missive pleine d'espoir.
Les disques :
Pas de bluray pour la France ( et attention , chers amis Hdvore, le bluray disponible chez nos voisins "grand-bretons" n'a pas d'option française d'après ce qu'on en a lu) mais un double disque coiffé d'un sur étui cartonné. Le film est présenté en VOST , la qualité d'image varie quelque peu selon les matériaux présentés. Mais l’expérience de visionnage reste globalement très bonne.
Dans le coffre à bonus :
- Commentaire audio
- Making Of
- Un message pour Ray
- Une bande annonce
- La caverne au trésor
- Des Images du tournage du « 7e voyage de Sinbad »