Sumuru, la cité sans hommes: Critique et test DVD



Avec «Sumuru, la cité sans hommes» Artus films continue d'explorer le labyrinthe de Jess. Une péloche qui ne manque ni d'arguments, ni de titres : The Girl from Rio, Rio 70, Future Women, The Seven Secrets of Sumuru et sur laquelle Ecranbis.com ne pouvait que poser un regard amoureux... mais pas forcement complaisant. Plongée dans le cinéma populaire des «late sixties", entre érotisme gentillet, science fiction de pacotille et espionnage sur fond de féminisme (à moins que cela ne soit l'inverse).


Tout droit sorti de l'esprit de Sax Rohmer (le créateur de Dr Fu Manchu) et né sur les ondes la BBC, le personnage de Sumuru imprime la toile et l'imaginaire des spectateurs en 1967. Produit par Harry Alan Towers, «The million eyes of Su-muru» offre son rôle titre à Shirley Eaton qui s'est fait connaître trois an plus tôt en se faisant dorer la pilule dans le troisième volet des aventures cinématographique de James Bond (Goldfinger). Deux plus tard, l'anglaise prête à nouveau son jolie minois et sa gracieuse silhouette à l'esprit diabolique de Sumuru pour «The girl from Rio» dont la réalisation est confiée à un certain Jess Franco, alors sous contrat avec Towers. Œuvre de commande, prototype même d'un cinéma dit populaire ou Bis, Sumuru, la cité sans hommes apparaît au moins autant comme une tentative désargentée d'installer son héroïne négative, que de surfer sur le succès d'un célèbre agent secret britannique. 



A ce propos, la version américain titrée «Future women», disponible en Zone 1 chez Mill Creek va encore plus loin avec un montage alternatif et renversé du générique, calqué sur les rituels introductifs de la franchise 007. Ainsi la séquence pré générique de la version française devient le générique et récupère la chanson «The Girl from Rio» dans la version US. Le tout étant précédé d'un sentencieux discours de Sonanda, alors qu'on retrouve cette même séquence après le générique de la version française. Passons donc sur ces quelques différences et sur l’existence de cette édition Zone 1 que je ne vous recommande absolument pas pour cause de recadrage 4/3, et de copie défaillante.




Place aux choses sérieuses ou presque. Dans «Sumuru, la cité sans hommes», on suit, sans déplaisir aucun,  les tribulations de Jeff Sutton, agent spécial et séducteur forcené, un petit air de notre national Jean Pierre Putters en prime (si si si, mais ne le lui dites pas, ça lui ferait trop plaisir), qui atterrit à Rio de Janeiro pour mieux  voler au secours de belle Ulla Rossini. Notre jeune gourde innocente au regard vague est retenue prisonnière, bâillonnée au ruban adhésif  au cœur d'une métropole futuriste, peuplée d’amazones armées jusqu'aux seins. Un régiment de guerrières sexy nanardes au service de la vénéneuse Sonanda (Sumuru), reine d'une ruche humaine, butineuse de dard à temps perdu et tondeuse à gazon par conviction. Il faut bien remonter le moral de ses croupes...


 Vous l'aurez sans doute compris en faisant de l’œil aux quelques images illustrant cette chronique, Sumuru est un bande dessinée pelliculaire colorée et passablement délirante, un œuvre radicalement exploitative au ton et à l'érotisme délicieusement surannés. Je serais presque tenté d' écrire un bonbon pour cinéphiles si ces 90 minutes n'étaient pas traversées par deux concepts intrinsèquement liés à l'époque et par conséquent remarquables.


A commencer par ce qui constitue la charge S.F. du film, cette fameuse cité futuriste portant le sobriquet de Femina. Un univers fantastico-foutraque, visiblement composé avec les moyens du bord... Quelques portes vitrées et  néons de salle des bains, un lot de tenues en sky moulant, une paire de mitraillettes en plastique, ce qui ressemble à un appareil de radio dentaire en guise de laser destructeur de particules et faute de décors, le plus moderne de l'architecture locale. On retrouve dans «The Girl From Rio» cette vision projetée de l’avenir et de l'élément futuriste, un futur qui ne verra jamais le jour mais dont on retrouve paradoxalement les vestiges autour de nous. Du cinéma à l'architecture, de l'âge de Cristal à La Grande Motte en quelque sorte, tout nous rappelle ce «demain d'hier», ou ce demain devenu hier sans jamais avoir été aujourd'hui et qu'il est de bon ton de taxer de Kitsch.


L'autre versant de l'édifice, c'est bien entendu une vision fantasmatique, parodico-cauchemardesque d'une  pensée féministe poussée dans un radicalisme à priori délirant. C'est à dire un féminisme qui ne caresserait plus comme objectif premier une forme d’émancipation mais la domination par l'affrontement des genres, la soumissions et en bout de course l’éradication de l'homme. (Ce qui transformerait comble de la bêtise, notre capitale du poil de touffe en ville fantôme en moins d'un génération.. A moins que : Zéro papa, zéro traca, PMA !). Ne nous cachons pas derrière nos télécommandes, "Sumuru" est sans aucun doute possible la moins indispensable des 3 additions de février à la collection Artus mais  le film  constitue paradoxalement par la légèreté de son propos, son esthétisme jouissif, un  met savoureux pour francophiles en rodage ou débutant.




Le disque :

Artus films offre à Sumuru une édition au master honorable au format 1.66 d'origine. Le tout est accompagné de mixages audio français et anglais ainsi que des sous titres français mais surtout d'une appréciable ration de suppléments.

-"Tourné à Rio" : une série d'entretiens avec Jess Franco, Harry Alan Tower et Shirley Eaton

-"La fille de Rio": une présentation du film par Jean François Rauger

-Un diaporama et les bandes annonces de la collection.