«The Game wants to play with you
!» à traduire par "le jeu veut jouer avec toi !" Mars 1994, cette maline
accroche se retrouve à orner les affiches américaines d'Arcade. La
sortie de ce conte cyber fut annoncée deux ans plus tôt avant d'être
décalée au début de l'année 93 et de finir par s'inviter sur les linéaires de vidéo clubs Américains l'année suivante. La cause ?
Quelques difficultés productionelles. On murmure en effet que le
réalisateur Hawaïen Albert Pyun et le producteur le plus érectile
du siècle dernier, Charles Band ne furent pas conquis par des effets
spéciaux digitaux plus tâtonnants qu'étonnant et commandèrent
une nouvelle copie sur le champs ! Histoire de rendre justice au
délire visuel de leur géniteur, les fulgurances numériques
d'Arcade furent donc repris de justesse.
Vu la qualité de cette révision,
on ose pas trop imaginer la proposition d'origine diront les
mauvaises langues dont je ne fais pas, dieu m'en garde, partie. Oui je préférerais écrire que comme l'essentiel des
pépites ayant trempé leur pellicule dans le l'infini du cyber space
("Le cobaye" pour n'en citer qu'une) et dans les labyrinthes pixelisés
de l'imaginaire, le propos graphique d'Arcade accuse désormais le
coup... de vieux.
Le temps certes ne fait rien
à l'affaire mais la nostalgie ne reste en général pas très
longtemps les bras croisés. A l'heure du retro-gaming, du plaisir
geek mélancolique à toutes les sauces et de l'apparition des premiers
digital-réacs, il est pratiquement impossible de visionner ces
quelques heures de bandes VHS sans retomber en adolescence. Comme
quoi la technologie va toujours de l'avant et l'homme passe son temps
à vouloir revenir en arrière. Paradoxe ? Peut être, sans doute
même. Tout commence par la démonstration d'une machine d'un nouveau
genre dans les entrailles d'un enfer très électronique, une salle de jeu
nommée, non sans malice «L'enfer de Dante». Le jeu s'appelle
«Arcade» ( ils se sont moins foulés sur ce coup là, je le
concède) et l'on s'empresse pour enfoncer le clou de distribuer des
consoles et accessoires permettant de reproduire la curieuse expérience
à la maison. Lunettes virtuelles dernier cris, gants
éléctro-sensitifs et bâtons de joie pour garder les mains sur le
manche. On a pensé à tout sauf peut être au fait que l’intérêt d'utiliser des
dataglove pour se caler les mimines sur un vulgaire joystick avait
un intérêt très relatif mais passons...
Le soir, la dure journée de cours au lycée rangée dans le tiroir
des tâches accomplies, dans l'intimité de la chambre, la jeunesse du
nouveau continent s'essaye à l’immersion dans une monde parallèle. Évidemment, le jeu va se montrer moins ludique que prévu et pour
cause d'une intelligence artificielle un tantinet psychotique, nos
hardcores gamers vont se voir arracher à la réalité, pire, à la
vie. Alex, nymphe lycéenne qui a l'air de savoir ce qu'elle veut,
ne compte pas s'en laisser compter par ce bout de programme mégalo et
passablement assassin. Pour sauver ses amis et l'avenir de l'humanité
(rien que ça), elle débute une partie avec la ferme intention de
suivre les conseils de France Gall ... "Débranche ! Débranche tout ! Débranche ! Débranche ! Débranche tout ! Revenons à nous !"
Et
revenons à Pyun. J'aurai bien du mal à cacher une certaine
tendresse pour ce cinéaste qui comme quelques autres (Fred Olen Ray
par exemple) sont parvenus, non sans déconvenues, à exister en marge
de l' industrie hollywoodienne. La route de Pyun croisera celle de Band
plusieurs fois. Au milieu des années 80 pour commencer, en pleine
période Empire Pictures avec un incroyable bobine SF semi musicale titrée
«Vicious Lips» (Pleasure Planet). Un film fou, un rêve éveillé
qui fut longtemps et injustement boudé par les spécialistes de la
série B. En 1991 cette fois-ci sous l’étendard de «Full Moon»,
Albert s'était fendu de «Dollman», un semi classique, allez, un
classique tout court.
L'idée de départ, comme toujours, fut extraite du cerveau délirant de son non moins délirant producteur. Le scénariste de «Coup pour Coup» (avec Van Damme) et Demonic Toys (et non Dominique Toy, n'est pas Strauss Kahn qui veut), David S. Goyer est chargé de l'écriture. je ne vous raconterai pas de blagues, on a un peu de mal à y retrouver la patte du futur auteur de "Man Of Steel", "Batman begins", "The Dark Knight". On y sens plus volontiers la griffe de l'homme qui se rendit coupable de «Ghost Rider 2». Dit autrement, et c'est à nouveau vrai pour la palanquée de péloches Cyber-SF de l'époque, le concept naissant de la réalité virtuelle (Quoi que Tron avait ouvert la porte une décennie plus tôt) peine et peinera au moins jusqu'à Matrix à tenir ses promesses.
L’intérêt est donc ailleurs. C'est à
dire dans la naïveté des concepts et d'une exécution visuelle
joyeusement datée. Non mais franchement quelle bonheur de voir nos
héros se trimbaler sans honte aucune dans un cybermonde sauce
«Nintendo 64», casqués comme des motards, sérieux
comme des papes ! L'orgasme, si n'est pas atteint par les tirades
down pitchées et robotiques du belliqueux «Arcade», n'est pas
loin. Seth Green (Le petit frère chiant de "Can't Buy me Love",
converti en loup garou trousseur de sorcières dans "Buffy contre les
vampires") et la pétillante A.J. Langer en primes ! (My so called
Life, Le sous sol de la peur, Escape from L.A.)
J'ai beau tourner la manette dans tous
les sens, je ne vois aucune bonne raison de déconseiller aux déjà
vieux réacs de mon espèce, un achat de ce DVD d'origine anglaise (Encore un édition 88
Films, j'avertis si ça continue, je m'expatrie!) car de toute évidence, le film risque fortement de ne jamais
se voir offrir d'édition de ce côté de la Manche. Si il y a un
trip nostalgique à se faire en ce premier trimestre, c'est bien
celui là !
Le disque :
Cette édition griffée 88 Films propose de découvrir ou redécouvrir "Arcade" dans une master très acceptable au format 4/3. Une seule et unique piste anglaise originale à s'envoyer dans les tympans. Mais pour compenser un numéro de Vidéozone consacré au making of du film. Document fort intéressant puisque il donne une petite idée des effets spéciaux d'origine. Pour le même prix une bande annonce, suivie de près par une flopée de trailer éditeur... Le tout à prix sympathique. Que demande le peuple ?