Stars du rock, génies du crime, même combat ? Non contente de faire la une, l'aristocratie culturo-criminelle ouvre les portes du métier a sa tendre progéniture. Enfants de la balle et du couteau arpentent en chœur les rues de l'imaginaire, dans l’espoir de se faire un prénom en lettres de feu ou en lettres de sang . Le nez toujours planté dans la fournée gothique d'Elephant films, l'Ecranbis.com se penche sur le couffin de «La fille de Jack l’éventreur». Attention voilà une petite qui ne fait pas que risette... et qui s'offrira aux bisseux de l'hexagone dans un berceau haute définition le 6 mai. En attendant rasez les murs et goûtez aux fruits défendus de cette chronique saignante !
Célèbre tueur en série Londonien de la fin du 19e siècle, Jack l’éventreur est au fil des adaptations littéraires et cinématographiques devenu un véritable personnage de la culture populaire, un croquemitaine historique. En 1971, dans «HANDS OF THE RIPPER» (Rebaptisé La fille de Jack l’éventreur pour son exploitation dans les salles françaises), la prestigieuse Hammer Films et le cinéaste Peter Sasdy (comme ça s’écrit ) lui offrent une descendance. Le film débute par un flashback étonnant. Après une mortelle journée de travail, Jack retrouve la chaleur du domicile conjugal. Mais quelques malencontreuses taches de sang vont le trahir. Découvrant que l'ennemi public numéro un n'est autre que son amoureux, et que la prochaine lessive promet d'être gratinée, Madame l’éventreur (Il fallait bien lui trouver un nom) exprime sans retenue son mécontentement . Elle sera délivrée de son supplice par l'objet de son désagrément, et ce sous les yeux du fruit de ses entrailles, Anna, la fille de Jack l’éventreur.
Quelques années plus tard, nous retrouvons la gamine dans une curieuse posture. Placée chez une vieille bique, médium sur les bords, arnaqueuse au milieu, elle est obligée de jouer le spectre vocal lors de lucratives séances de spiritisme factice. Le soir, elle se voit même contrainte à recevoir dans sa chambre de vieux messieurs tactiles, aristocrates à la moustache baladeuse et autres rats de bordels volontaires à la chaude-pisse. Un soir, alors qu'un politique en vue tente de l’étreindre pour quelques livres, Anna est victime d'une crise hallucinatoire carabinée qui la pousse à empaler sa mère maquerelle. Le docteur Pritchard, John de son prénom aperçoit le client s’enfuir à toutes jambes et découvre la scène du crime. Pourtant, il omet de signaler la présence d'un tiers à la police.
Cette crise d’amnésie ne tarde pas à trouver une explication rationnelle. Notre sympathique Docteur Pritchard qui vient lire Freud sans l'avoir vraiment compris, espère percer les mystères des âmes sombres et la folle mécanique de l'homicide. Il s'en va donc faire libérer la belle de sa cellule pour lui offrir le gîte, le couvert et même la garde robe de sa défunte femme. Manque de chance, au moindre scintillement, Anna regoûte aux joies de la transe. Une domestique en fait les frais, le corps plongé dans une baignoire, un demi miroir planté sous la gorge. L'accident ne décourage pas Pritchard qui se débrouille comme il peut pour expliquer l’absence de la servante. Pire, il se lance dans quelques séances amateur d'hypnose, censées ramener Anna dans les profondeurs de son enfance. Peine perdue, l' incorrigible adolescente s’échappe et s'en va traîner dans les rues les moins éclairées de la capitale anglaise. Là, elle tape dans l’œil d'une prostituée... à coup d'aiguille à cheveux. John Pritchard pourra-t-il apaiser la folie meurtrière d'Anna ? Découvrira-t-il son terrible secret ? Vous le saurez en enfournant la galette bleutée de «La fille de Jack L'eventreur » dans votre platine.
Avec «Hands Of the Ripper» , Peter Sasdy réussit un troublant entre deux, une œuvre sur la lame du rasoir. Le film peut être d'abord interprété comme un film d'horreur réaliste, pour ne pas dire terre à terre. Mais également comme une œuvre résolument fantastique. Anna est elle victime de schizophrénie et de bouffées délirantes, l'esprit de son père vient-il la posséder et poursuivre ainsi ses sombres desseins dans le monde des vivants ? Rien n'y est pour ainsi dire tranché ou plutôt tout est laissé à l’interprétation du spectateur.
On pourrait également y voir presque sous la table, une critique de la psychanalyse freudienne. Pritchard incarne à la fois l’entêtement scientifique, la volonté forcenée du «faire sens» et une certaine vision de l’échec rationnel. La parenté d'Anna et du Jack L’éventreur lui est d'ailleurs apportée sur un plateau par une voyante et non pas par ses expérimentations hypnotiques. Au fond qu'Anna soit dérangée ou sous l'emprise d'un esprit démoniaque, ce que peint le film de Sasdy c'est surtout la folie de Pritchard. La réalisation, elle se perd parfois dans un classicisme élégant. Une histoire de climat, quelques dérapages rouge sang et le refus de tout érotisme. On est loin des productions majeures de la Hammer films, diront les puristes. La fille de jack l'éventreur reste toutefois un film joliment troussé et plus malicieux qu'il n'en a l'air.
Le disque :
Elephant films livre le film de Peter Sasdy dans un chouette combo Bluray + DVD, coiffé d'un sur étui cartonné. Nous avons droit à un beau master HD (Pas de miracle, il y a un peu de fourmillement sur les plans sombres ) et une copie restaurée, accompagnée d'une français et d'une piste anglaise sous titrée en français s'il vous plait. L'édition a la qualité de proposer un décryptage du film par le rédacteur de l'Ecran Fantastique, Alain Schlockoff en personne. Un supplément intéressant et sympathique.