1961, Youri Alexeïevitch Gagarine
s'offre un vol plané au dessus l'orange bleue et donne par la même
occasion à la mère Russie un coup d'avance sur le programme
spatial américain. On oublie souvent de dire que le premier terrien
à s'être élancé au delà de notre douce atmosphère était une
terrienne, à quatre pattes qui plus est. (Laïka, petite boule de
poil au regard larmoyant mise sur orbite en 1957). On oublie tout
autant de dire, que le cinéma soviétique de science fiction n'est
pas resté les bras croisés face aux assauts "space impériaux" de
l'Oncle Sam . Ce mois-ci, Artus films, déjà coupable de
quelques savoureux coffrets (Destination Mars, Voyage Vers la
lune...) inaugure une nouvelle collection «SF Vintage» entièrement
consacrée, comme son nom l'indique, à l'âge d'or de la science
fiction. Dans cette première fournée de Digipack rutilants, un
voyage stellaire jusqu'à la planète des tempêtes de Pavel
Klushantsev. Ecranbis.com a reçu le signal en provenance de la
constellation «cinephilia» et lance une chronique en éclaireur.
Prend ça dans ta tête d'actionnaire, cochon de capitaliste !
L'industrie soviétique: les hommes travaillent, les robots regardent |
Notre maître incontesté, Alain Petit prévient dans la
présentation du film embarquée sur la galette, «La planète
des tempête» aka Планета
бурь (oui tu as bien lu ) aka "Planeta Bur", a longtemps fait
partie des pépites difficiles à caresser des mirettes. Du moins
dans sa version originale, puisque le radin magnifique, l'illustre
Corman, Roger de son prénom, aurait ramené d'une de ses pérégrinations en terre rouge les droits d'exploitation du film.
(C'est toujours mieux que la chtouille). Payé une misère, il va
sans dire. Ainsi, Planeta Bur connaîtra une nouvelle vie, enfin deux
nouvelles vies sous la forme de savoureux saucissonnages. En 1965,
l'américain Curtis Harrington (Tiens payez vous son «The Killing
Kind» chez Artus, c'est très bien, si si !) aura la lourde tache
d'y adjoindre des séquences additionnelles avec Basil
Rathbone
tournées en une demi journée sur le plateau et avec les costumes de
«Queen
of Blood». (Qui contient également des inserts
du film de Klushantsev).
Le résultat sera distribué sous le titre «Voyage to the
Prehistoric Planet».
La Trabant de l'espace |
Le public américain n'y ayant vu que du feu, Peter Bogdanovich remet le couvert en 1968 avec «Voyage to the Planet of Prehistoric Women» qui récupère les plans volés par Harrington pour caviarder une nouvelle aventure fantastique et improbable. Mais passons sur ces considérations purement exploitatives et quittons notre atmosphère... Après quatre mois de transhumance dans le cosmos, quelques millions de kilomètres de vide dans les turbines, le Vega, le Capella et le Syrius, trois engins d'exploration soviétique approchent de Venus. Coup de sort, la planète de l'amour presque à portée de main, la mission prend un coup dans l'aile. Un rocher baladeur croise le chemin du Capella qui s'en trouve désintégré d'émotion. La prudence imposerait que nos touristes de l'espace attendent patiemment l'arrivée d'un vaisseau de remplacement, l'Arturus, mais après moult tergiversations, il est décidé d'envoyer 2 hommes et un robot à la conquête de ce nouveau monde.
Non ce cosmonaute ne porte pas un cornet sur la tête, c'est un effet d'optique... |
Ayant
perdu le contact avec cette première mission d'exploration, le
restant des équipages est appelé à se poser à son tour. A
l'exception de Masha, qui bien que brûlante à l'idée de prendre
l'air devra garder l'orbite. La belle en verse une larme.
Arriver si près du magasin et ne pas profiter des soldes ! Rendez
vous compte ! Pendant ce temps, les naufragés découvrent un univers
des plus mystérieux, peuplé de plantes carnivores géantes, de
figurants en costume de Godzilla et de créatures préhistoriques en pâte à modeler. La fièvre des marais les guette, mettant les
circuits du plus mécanique des membrse de l'équipage à l'épreuve.
Par chance, la jolie soviétique a veillé à l'intendance,
médication providentielle et vodka en bidon accompagnent les
rations cosmiques. (Masha t'a donné du jus ?). Les deux groupes
vont-il finir par se retrouver et percer le secret de la planète des
tempêtes ? Pour le savoir, il vous faudra enfourner la galette
d'Artus dans votre platine cosmique...
Suppositoire socialiste |
D'entrée,
la production prévient ce film a été réalisé avec les
connaissances scientifiques offertes par l'époque. A traduire par «
Pour le documentaire, il faudra repasser, pour la propagande vous
pouvez entrer de suite». Oui tout dans cette aventurette interplanétaire respire l'humaniste forcené et l'universalisme
niais, l'espoir fou de réunir les hommes et les femmes de la Terre
sous un seul et unique étendard. Celui d'un communisme triomphant.
Dans ce futur d'hier, la «fin de l'histoire» semble avoir été
consommée. Un équipage russe, Un cosmonaute américain et John son
robot presque échappé de «Forbidden Planet» explore main dans la
main de nouveaux mondes, on rit des religions d’antan et on espère,
au détour de quelques réflexions vaguement métaphysiques, glisser le
mandrin du marxisme dans tous les trous de la galaxie. L’évangélisation pacifique ayant quelques limites, on ne se gène pas
pour tirer à vue sur les pauvres occupants reptiliens de la Planète
Bur. Mais ne vous y trompez pas. Mis à nu, déshabillé de ses
oripeaux idéologiques, le film de Klushantsev délivre quelques
beaux moments de science fiction et empile les trouvailles visuelles.
Tout y est charmant à défaut de réussi. A l'image de cette
cosmo mobile, un aéroglisseur pré-Star Wars traversant des décors
subtilement enfumés. Clou du spectacle l'abandon du robot et sa
disparition dans la lave. Une séquence préfigurant avec plus de 20
ans d'avance le "Terminator" de James Cameron. C'est du tout bon camarade !
Fleur communiste... |
Le disque :
La
galette Artusienne qui nous est tombée dans la platine nous permet
de découvrir «Le planète des tempêtes» dans une copie des plus
honorables au format 1.37 d'origine accompagnée de la piste
originale russe et d'un doublage français. Ajoutons que des sous
titres français optionnels font partie de l'aventure. Pour prolonger
les plaisirs du visionnage, l'éditeur a eu la bonne idée de donner
la parole à Alain Petit pour une passionnante présentation de la science fiction
russe. Le tout est suivi de près par une galerie de photos et
d'affiches ainsi que des bandes annonces de la collection. 13€90 et
pas un rouble de plus.
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