Le club des monstres : critique et test bluray



Ce mois-ci Elephant films s'offre une entrée fracassante dans le cœur des cinéphiles de l'étrange. L'éditeur déterre en effet une poignée de productions fantastico-gothiques anglaises pour les servir dans un écrin haute définition. Une flopée de pépites sombres produites par la sacro-sainte Hammer, et parmi lesquelles une bobine "presque" (et j'ai bien dit presque) estampillée Amicus s'est glissée en douce et par la porte de la cuisine. (L'un n'excluant, n'en déplaise aux amateurs de gonzos, pas l'autre). Le Club des monstres ! Une œuvre au "gothisme" tardif qui eu déjà l'honneur d'une édition DVD française chez Opening. Voilà qui valait bien un article de l'Ecranbis.com

John Carradine en personne
Dans les années 80, l'horreur gothique à l'anglaise écrit ses toutes dernières pages. La prestigieuse Hammer qui a livré son dernier effort pelliculaire en 1979 abandonne les grands écrans au profit de plus modestes anthologies télévisuelles. (Hammer House Of horror en début de décennie, puis Hammer House of Mystery and Suspens en 1984 ). Du côté de  l'ennemie héréditaire, le rival de toujours,  après s'être frotté à l'aventure fantastique (avec les réalisations de Kevin Connor), Milton Subotsky, cofondateur légendaire de l'Amicus consent au bestiaire fantastique une parade ultime. Un film à sketchs à la fois crépusculaire et parodique, hybride donc, embarquant Vincent Price (pour son premier rôle en dentier), John Carradine et Donald Pleasence en personne. Coup du sort  ou clin d’œil,  la réalisation en sera confiée à celui qui fut l'un des artisans de la Hammer films: Roy Ward Baker.

Porte cierge, un beau metier
En guise d'introduction et de fil conducteur, Ronald Chetwyn-Hayes, maître du macabre et écrivain britannique à succès traverse de nuit les rues de Londres. Aux abords d'une impasse, un homme, visiblement mal en point, l'aborde. Chetwyn-Hayes lui propose poliment son aide sans se douter qu'il a affaire à un vampire mondain portant le sobriquet d'Eramus. Ce dernier s'empresse de planter dans son bienfaiteur ses crocs et de se désaltérer. Pour le remercier de son don du sang involontaire, Eramus convie l'auteur à pénétrer dans un établissement secret, caché dans les entrailles de la ville. Un lieu où nul humain n'est jamais entré ou plutôt un lieu dont nul humain n'est jamais sorti: Le Club Des Monstres. Le vieux Chetwyn-Hayes hésite mais considérant qu'il pourrait y trouver l'inspiration pour son nouvel ouvrage, il accepte. Sur place, dans une ambiance survoltée, près d'un dancefloor bondé de créatures de la nuit, Eramus livre les secrets de la condition monstrueuse à travers trois contes délicieusement macabres...

Donald Pleasence m'a brisé le coeur

Le premier nous accroche au destin d'une curieuse créature hybride, fruit d'un coït malencontreux et inter-espèce. Le Shadmock, monstre aristocrate, pâle comme un suceur de sang cherche depuis des mois une employée pour lui servir de secrétaire. Les postulantes sont nombreuses à frapper à sa porte mais lorsque celle-ci s'ouvre la simple vision de la créature suffit à démotiver les chômeuses, qui s'enfuient en hurlant jusqu'au pôle emploi le plus proche. Une arnaqueuse va toutefois se faire violence en espérant mettre le nez, et la main, sur la fortune de la bestiole. La belle accepte même une bague de fiançailles, mais ignore l'étrange pouvoir de son futur amoureux. Le Shadmock peut en sifflant réduire en cendre tout être de chair.

Dans le second segment, un garçonnet timide peine à faire ses marques dans un monde sans pitié. Ses camarades de classe le martyrisent. Son père dort toute la journée et quitte le domicile familial dès que la nuit tombe en lui expliquant que le travail tue. Un jour, alors que sa mère le laisse seul à la maison, le gosse s'autorise une descente dans la cave de la bâtisse et découvre avec stupeur son père dormant à crocs fermés dans un cercueil. Paniqué, il tente de fuir mais il est intercepté par une brigade d'extermination de créatures de la nuit. Il va devoir leur montrer la cache secrète de papa et assister à sa mise en pieux !

Les habitants de Paris découvrant l’élection d'Anne Hidalgo

Troisième sketch: un simili Jean Pierre Mocky, réalisateur de film d'horreur, file dans son bolide à travers la campagne anglaise à la recherche d'une nouvelle «shooting location». Sur un petit chemin, la brume absorbe sa voiture et il finit dans un cul de sac: un village semblant avoir échappé au temps. Pénétrant dans une auberge pour obtenir quelques renseignements, il se trouve rapidement entouré d'une armée d'autochtones décidés à le retenir pour la nuit. Sa voiture sabotée, le cinéaste se résout, contraint et forcé, à prendre une chambre. Mais la jeune servante qui lui amène le couvert lui fait de bien étranges révélations. Le village est sous le coup d'une terrible malédiction depuis l'arrivée de Goules affamées. Ses habitants sont réduits à déterrer des corps d'un cimetière et à s'en repaître.

Quand Vincent Price parle, les monstres l'écoutent...

Le film à sketchs a beau être une figure classique de l'horreur, il n'en reste pas moins un exercice périlleux. Structurellement d'abord puisque le découpage narratif d'un long métrage en plusieurs segments aboutit fatalement à leur mise en concurrence. Deuxièmement, car ces sortes compilations cinématographiques sont très souvent les victimes d'un manque d'homogénéité flagrant. Et même si ici tous les sketchs sont l’œuvre d'un seul et unique réalisateur, le segment central, victime d'une second degré mal maîtrisé peine à maintenir le niveau imposé par les autres histoires et le fil conducteur mené par deux stars du cinéma fantastique.

Vous l'avez sans doute déjà lu à droite ou à gauche, «Le club des monstres» n'est certainement pas un classique du cinéma fantastique britannique mais reste même 34 ans après sa réalisation et en dépit de son insuccès commercial, un spectacle divertissant voire cinéphiliquement important. Qu'on le considère ou pas comme l'ultime fruit de la branche Amicus, l’effort de Roy Ward Baker ne sonne pas vraiment le glas d'une époque (déjà révolue), nous dirons plutôt qu'il met un terme à la longue dégringolade du fantastico gothique anglais. Et ce dans un curieux festival bariolé faisant entrée le rock'n'roll dans l'imaginaire de la firme. Une dernière saillie, souvent humoristique... Presque parodique mais qui se doit de figurer en bonne place dans la vidéothèque de tout amateur de fantastique. Vous voilà prévenus...


Le disque :

Elephant films nous propose de découvrir ou redécouvrir "Le club des monstres" dans une édition combo Bluray +DVD emballante. Le film est présenté dans une version restaurée et HD au format 1.77. Le master est juste superbe, le gain "haute définition" est ici indiscutable. Pour le plaisir des portugaises, des pistes anglaises et françaises DTS HD AUDIO 1.0 (DD 1.0 pour le DVD) ainsi que des sous titres français. Comme pour les autres titres de la collection, Elephant films a demandé à Alain Schlockoff de présenter le film dans un document inédit de 33 mn pour lequel le rédacteur en chef de l'Ecran fantastique revient sur ses souvenirs du tournage. En prime des bandes annonces et une galerie d'images. Le tout pour 19€99 dès le 6 mai dans vos boutiques et en ligne

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Souvenirs de tournage par Alain Schlockoff