Piranha 2 3D : Critique et test bluray


Nous nous étions fait une raison, à tort. Sorti simultanément en V.O.D. et en salles aux États Unis en juin 2011, Piranha 3DD n'avait, faute de distributeur, eu l'honneur de caresser les toiles françaises. Un état de fait difficile à accepter pour les cinéphiles puisque le film auquel il fait suite, sorti en pleine explosion 3D, avait embrassé de ce côté de l'Atlantique un succès critique mais également commercial. On espéra, un temps, que Piranha 3DD trouve le chemin de nos mirettes, à dos de galettes argentées, comme cela fut le cas chez nos cousins d’Angleterre. Mais victime du syndrome «The Ward», la péloche se fit attendre puis oublier, contraignant bon nombre de vidéovores (dont votre serviteur) à sacrifier quelques euros sur l'autel du dieu import. Stupeur au cœur de l'été 2014, voilà que Piranha 3DD revient sur nos écrans radar. La chose sera disponible dès le 6 août en DVD, Bluray 3D/2D mais également dans des packs réunissant les croquants efforts d'Alexandre Aja et John Gulager. Le tout distribué par Pathé. Abandonnant farniente, baignade, chouchous et serviettes de plage, Ecranbis.com reprend du service le temps d'une chronique qui ne fait pas plouf !


Le piranha est-il l'étendard aquatique du cinéma bis ? Assez petit pour se glisser dans le plus rachitique des budgets, mais tout aussi flippant qu'un grand requin blanc... Son histoire d'amour avec la série B débute au lendemain des «Dents de la mer». Le premier blockbuster de l'histoire entraîne dans son sillage une véritable parade de monstres marins. Poulpe collant, sardine atteinte de gigantisme et pieuvre patibulaire se bousculent aux portes de l'imaginaire populaire. Roger Corman, Mr «How I made a hundred Movies in Hollywood and never lost a dime», ne tardera pas à relever les filets de la Jawsmania. Piranha, dont il confie la réalisation au jeune Joe Dante, a une place à part dans le cinéma horrifique de l'après Moby Dick Spielbergien. Succès colossal au box office et devenu presque instantanément culte, la bobine enfante à son tour d'une série de copies, suites et remakes. On retiendra bien entendu «L'invasion des piranhas» d'Antonio Margueriti, escroquerie transalpine des 80's mais aussi pour ne pas dire surtout une suite offrant à ses protagonistes d'eau douce des ailes, et à un certain James Cameron, une première (fatalement douloureuse) expérience de réalisation.


En 2010, quinze années après que Roger Corman ait produit son propre remake pour la télévision (Piranha – 1995), un certain Alexandre Aja, fils d'un réalisateur français célèbre, se retrouve aux commandes de «Piranha 3D» pour les comptes des frères Weinstein. Le frenchy se défendra d'abord d'avoir joué la carte de la redite. Mais une fois l’œuvrette sur nos écrans, sa posture deviendra pour le moins acrobatique. Les deux films visionnés bout à bout, ne laissent guère de doute sur la nature véritable de cet effort 3D converti, il s'agit d'un véritable «remake» certes non scénaristique mais situationnel du film de Dante... Sorti au bon moment , alors que le nombre de salles équipées 3D explose, Piranha 3D et son faux relief, à peine mieux troussé que celui du Choc des titans, cartonnent, occultant une production aussi chaotique que conflictuelle. A quelques semaines de la sortie, Dimension films tente de faire supprimer nudité et effusion sanglante, mais Aja et Vasseur ont tenu bon. Le montage final est, de leur aveu même, à 80 % celui qu'ils avaient initialement souhaité.

Le succès instantané de cet «hommage fiévreux au cinéma de genre des 80's'» entraîne dès les premières journées d'exploitation l'annonce d'une suite. Sa réalisation atterrira dans les mains d'un certain John Gulager. Un cinéaste remarqué pour son triptyque horrifique foutraque et énergique : la série des «Feast». Patrick Melton et Marcus Dunstan (scénaristes des Feast et quelques épisodes de la franchise «Saw») travailleront sur le script. La prise de vue est prévue pour le début d'année 2011 et l'on avance une date de sortie l'été de la même année.


Première déconvenue, les températures extérieures de l’hiver en Louisiane empêchent un tournage en maillot de bain. Joel Soisson, producteur émérite et expérimenté, hérite du bébé, de l'eau du bain et de la tache de réécrire le scénario. Le tournage débute finalement en Caroline du nord au printemps. 33 jours de baignades en 3 dimensions. A l'opposé de Piranha premier du nom, Piranha 3DD sera non pas post converti mais tourné en 3D native. Suite au retard pris par la production, Dimension a entre temps annoncé une sortie pour l'automne. Mais c'est finalement avec 7 mois de retard que l'effort de Gulager atteint les écrans américains pour une exploitation limitée (86 salles seulement !) doublée d'une surprenante sortie simultanée en Video on demand.

Suite à l'attaque de prédateurs préhistoriques et affamés, le lac Victoria a été placé en quarantaine. Le lieu, point de ralliement de milliers de spring breakers n'offre plus qu'un spectacle de désolation, entre ville fantôme et plage apocalyptique. Chassez le touriste, il revient au galop ! A quelques encablures de là, un certain Chet qui vient de rénover son parc aquatique «The Big Wet» s’apprête à rouvrir les portes. Une inauguration en grandes pompes en présence d'une star de la télévision, David Hasselhoff et de peu farouches sirènes. Maddy, sa belle fille, rentrant d'un périple universitaire découvre avec horreur que établissement familial est en train de se transformer en lupanar mais surtout qu'afin de faire quelques économies sur les factures d'eau, son beau père a eu la fort mauvaise idée d'installer une pompe pour extraire l'or liquide d'un lac souterrain.


Paradis du baigneur prudent, des flippés et des amateurs d'eau translucide (Peu importe le chlore pourvu qu'on voit les fesses), la piscine et les pédiluves ne sont plus les «safe places» d’antan. Tel semble être le seul et unique message de ce Piranha 2 3D qui a perdu en France le calembour  lui servant de titre original. On aurait pu craindre que les frères Weistein débarrassés d'Aja et Vasseur, ne se soumettent l'oeuvrette au diktat de la censure et de la classification PG13. Mais contre toute attente, ce Piranha deuxième du nom est fidèle à la devise «Sea Sex and Blood» du premier opus. Mieux, il joue la carte de la surenchère et de la double ration. Plus de gore, plus de chair, plus d'humour et d'auto-dérision, au risque de faire passer cette heure un quart pour un prolongement parodique ou  un muckbuster... Le résultat ? Un enchaînement un peu forcé de gags, de gros plans fessiers, mammaires et de séquences horrifiques dont le caractère forain saute, 3D oblige, aux yeux.

Il n'en faudra pas plus pour que les plumes les plus acérés de la presse dite spécialisée crient au nanar instantanément. Mais même réduit à l'état de spectacle sans queue ni arête, Piranha 2 3D n’ennuie jamais. Paradoxalement grâce à son indélicatesse, ses caméos cache misère, sa touche MTV et la vague odeur de slip de bain qui se dégage de son court runtime. Les amateurs de bobines écervelées peuvent donc y aller sans avoir peur de boire la tasse. Au moins pour découvrir la fameuse séquence du Van, écrite pour le premier Piranha mais finalement non tournée par Aja. Pour les autres, attention, ça pique un peu les yeux !




Le disque :


Pathé livre un bluray réunissant le version 2D et 3D du film au format 1.77. Côté 2D, la copie frôle la perfection. Définition crispy et bandante, saturation des couleurs parfaitement maîtrisée. Un véritable sans faute. Rayon 3D, le relief du film est réputé pour "ghoster" un peu  ainsi que pour l'agressivité de certains plans. Alors effectivement, il y a un peu de Crosstalk et certaines séquences ( la publicité pour le «The Big Wet», les descentes de toboggans aquatiques) se révèlent inconfortables. Mais il s'agit de phénomènes isolés. Piranha 2 propose une 3D efficace, une profondeur constante et quelques effets de projection sympathiques. Pour le plaisir du canal auditif, des mixages DTS HD audio 5.1 en langues française et anglaise. Dans le bain aux bonus, cette édition française reprend l'essentiel des suppléments des éditions américaines et anglaises. Le commentaire audio du réalisateur en moins : Quelques minutes de scènes coupées, «Les dessous de Piranha 2» un making of trempant malheureusement dans l'autosatisfaction, de courtes featurettes humoristiques dédiées à David Hasselhoff, Gary Busey et David Koechner, ainsi qu'une inattendue leçon de John Mc Enroe.

Saluons le fait que Pathé propose cette édition HD 3D/2D a un petit prix : 19€99. Ceux qui n'ont par encore le film d'Aja dans leur vidéothèque lui préféreront peut un pack Bluray 3D embarquant les deux films pour 9€99 de plus.