Terreur extra-terrestre : Critique et test DVD



En ces temps crépusculaires pour le support et ses amoureux transis, les amateurs de mauvais genre (les vrais, ne vous laissez pas tromper par les imitations) seront certainement heureux d'entendre que le «Terreur extra-terrestre» de Greydon Clark vient titiller nos manges disques et convoquer en mémoires de vidéovores quelques souvenirs émus. Et ça commence ras la touffe...d'herbe par un jeu de camera subjective rappelant avec malice le générique de Jaws, le parfum des hêtres et des genets en plus. Fausse piste, notre créature «from outer space» n'a pas grand chose du prédateur naturel peint par Spiel', ni même de la version cosmique de Dan O Bannon . Bien sûr il n'est pas interdit d'établir un lien entre du film de Clark et de celui Ridley Scott, mais il faut immédiatement concéder au scénario de Without Warning de sortir suffisamment des sentiers battus pour tromper ceux qui n'ont su y voir que la transposition terrestre d'Alien.

"Le film préfigure ainsi, avec quelques sept années d'avance, ce que sera Predator et sa meute de sequelles/crossover … Il le préfigure d'autant plus, si je peux me permettre, que l'ancien basketteur Kevin Peter Hall campe le braconnier d'outre espace dans les deux métrages" 

 Et non ! Son visiteur hydrocéphale et couleur Schtroumpf n'est pas juste l'un des plus trippantes apparitions extra-terrestres de l'histoire, ni cet animal sanguinaire répondant par un mécanisme strictement instinctif aux nécessités premières que sont la survie du soi et de l’espèce. Il est d'abord un chasseur raisonné, méthodique et joueur, prenant un plaisir tout sadique (et pour tout dire très humain) à la traque comme à la mise à mort. Le film préfigure ainsi, avec quelques sept années d'avance, ce que sera Predator et sa meute de sequelles/crossover … Il le préfigure d'autant plus, si je peux me permettre, que l'ancien basketteur Kevin Peter Hall campe le braconnier d'outre espace dans les deux métrages.



Pour jouer avec les mots, les motivations de l'Alien sont ici nettement plus floues (sic!). Notre Bubble Head collectionne-t-il les trophées ? Assure-t-il de simples besoins nutritionnels ? Est-il un psychopathe échappée d'une planète prison, un Michael Myers cosmique? Ce malin de Clark ouvre toute les portes en prenant le soin de n'en refermer aucune, pas même celle de l'invasion méthodique et belliqueuse, thématique très 50's éfleurée à travers le prisme paranoïaque et charnelle d'un bidasse agité du cocotier (le surjeux maitrisé par Martin Landau en prime). Côté mode opératoire, l'arc et flèches prévus par le script original furent, nous dit-on, abandonnée sous la plume correctrice du père Clark au profits de freesbies organiques qui marquèrent quelques générations de rats de vidéoclub. Évidemment l'effet saisissant lorsque nous découvrions la chose dans les copies délicieusement sombres de l'ère VHS, laisse désormais apparaître un fil de pêche malencontreux.



Dans les bonus, Greydon annonce main sur le cœur que le tournage fut une partie de plaisir, contredisant une autobiographie nettement moins «corporate» dans laquelle il dévoile quelques anecdotes plus croustillantes. Le financement du film à Las Vegas par des investisseurs venus de l'industrie pétrolière (c'est qui s'appelle taper directement à la pompe), les problèmes de cachet de Cameron Mitchel, la stupeur de Landau et Palance découvrant qu'ils ne seraient pas doublés pour les scènes d'empoignades et surtout les caprices de sa jeune actrice principale. Comble de malchance, La gamine se blessera dans les bois, compromettant la suite de la production. Pas rancunier (A moins qu'il ne s'agisse de respecter les codes d'un genre alors à la mode) , Clark offrira à sa vierge la qualité de dernière survivante...

"...si Terreur Extra-terrestre apparaît définitivement comme daté et d'une subtilité très relative, son alien à la beauté magnétique et sa poignées de stars suffisent toujours à rendre son visionnage indispensable."


ll serait sans doute malhonnête de ne pas prévenir les jeunes loups, «Terreur extra-terrestre» a comme on dit pris un sacré de coup de bambou entre les paraboles, et ne constitue plus à l'heure où j'écris ces lignes que l'écho plaintif d'un passé révolu... qui se trouve être le notre. (Du moins le mien) Mais si le film apparaît définitivement comme daté et d'une subtilité très relative, son alien à la beauté magnétique et sa poignées de stars suffisent toujours à rendre son visionnage indispensable.


Un œil sur le disque :

Le plus crocodilesque des éditeurs était attendu au virage et le couteau entre les dents . La bonne nouvelle, c'est que Terreur extra-terrestre nous arrive dans une copie en Flat résolument plaisante, un master SD 16/9 pour en prendre plein la dalle. La moins bonne c'est que le disque n'embarque pour seule et unique piste audio, le doublage français d'époque. Un carton prévient d'ailleurs le cinéphile en début de lecture, le film de Clark nous est présenté dans le montage d'exploitation français. Les amateurs de V.O. et d'uncut vont faire la moue. Rayon suppléments, on retiendra une présentation du film par Greydon Clark réalisée pour les besoins de cette édition, mais aussi « Terreurs extra-terrestres, les aliens au cinéma « : un bonus concocté parle sympathique Stéphane Leroux, une bande annonce et le court métrage Planet of Shadow de Guillaume Bouiges. La galerie photo promise par la jaquette n'a visiblement pas trouvé de place sur le disque définitif. Bref tout n'est pas encore parfait pour le petit éditeur jusqu'ici cantonné dans l'édition de CD tendance revival, mais ça s’améliore !