Operation Goldman: Critique et test DVD


1962, le torse velu de l'agent double zéro sept imprime les écrans et les mémoires. Sean Connery aura un fils, James Bond en aura plusieurs. Et tandis que les vieux de la veille, Francis Coplan (un français belge) et Hubert Boniseur De La Bath (Un américain français) reprennent du service avec le plus réjouissant des opportunismes, une flopée de resucées atteignent les toiles. Nom de code 3S3, AD3, 077, 777, 008... Une quasi suite logique et une formidable parade d'espions à laquelle il ne faudra pas omettre d'ajouter le Lieutenant Harry Sennet. Amerloque au charisme relatif, mais à la générosité avérée, notre homme dégaine flingue et espèces dans «Operation Goldman»: Une euro Bonderie succulente que l'éditeur Artus Films a eu la bonne idée d'exhumer en ce début d'année 2015. L' E.C.R.A.N.B.I.S. a dépêché son meilleur agent. 

On dit les blondes canons, mais celle-ci est visiblement plutôt pistolet...

"Évidemment, Operazione Goldman, pioche allègrement dans les quatre premières apparitions cinématographiques de l'espion britannique."
 
Lorsque Opération Goldman sort en Italie en avril 1966 et une petite année plus tard dans notre petit hexagone, les éléments constitutifs à la mythologie «Bondienne» ont déjà été installé dans la culture populaire par quatre bobines grand-bretonnes. James Bond contre Dr No, Bons baisers de Russie, Goldfinger et Opération Tonnerre. De manière fluctuante, m'empresserai-je de préciser car, mis bout à bout la série des James Bond ne constitue pas, contre toute attente, une œuvre monolithique. Les aventures de l'agent 007, à l'image du célèbre thème de Monty Norman (Ta-da-ta-daaaaaaa!) vont connaître des modulations, de multiples ruptures tonales et formelles... Alors évidemment, Operazione Goldman, pioche allègrement dans les quatre premières apparitions cinématographiques de l'espion britannique. Pratiquement jusque dans ses titres d'exploitation. L'original subtilisant le Gold de «Goldfinger», et le titre américain "Lightning Bolt" louchant sur «ThunderBall» (Opération tonnerre).

Valerie Damidot ( au centre) découvrant l’ampleur de la tache !

"Montre émetteur, montre compteur Geiger, pistolet au vitriol, stylo à gaz... Rappelant non sans malice que même dans l'art d’arrêter de vivre, on arrête pas le progrès. "  

On y retrouve ainsi ce cinéma d'espionnage à l’esthétique pop, ces coups de savates prodigués avec la souplesse d'un Playmobil, ces poupées qui font oui, une main sous la jupe de la science fiction, un peu de machisme ordinaire, d'exotisme nécessaire et d'humour salvateur. Sans oublier le fétichisme technologique d'une époque marquée par la démocratisation du lave linge et l’obsession du progrès. La caution de modernisme est de rigueur, elle sera à l'écran tout entière contenue dans le concept de gadget. Montre émetteur, montre compteur Geiger (Faudra en causer à Julien Dray), pistolet au vitriol, stylo à gaz... Rappelant non sans malice que même dans l'art d’arrêter de vivre, on arrête pas le progrès.

si à 30 ans tu n'as pas une montre qui s'allume orange, c'est que tu as loupé ta vie...

"Margueriti, touche à tout magnifique, passé du péplum au space opéra, du fantastique au western, s'offre avec le film d'espionnage une nouvelle mue et un nouveau terrain de jeu."

Dans ce festival de stéréotype, Anthony Eisley campe le séducteur compulsif, le culbuteur d’hôtesses de l'air, agent secret pour tromper l'ennui ou sa femme (Ce qui à peu de chose près revient au même) . Mais  notre chaud lapin a semble-t-il troqué sa licence to kill, pour le permis de raquer. On voit ainsi ce panier percé traverser son aventure, un chéquier à la main, réglant les conflit d'un stylo expert … lorsqu'il ne s'agit pas d'accompagner ce honteux détournement de fonds publics par les plus farfelues des répliques (J’arrondis à un million de dollars, c'est plus simple pour la comptabilité). Originalité toute italienne, Margueriti lui met le capitaine Patricia Flanagan dans les pattes. Mi faire-valoir, mi supérieur. La belle gradée accompagne notre héros, acceptant  baisers volés et goguenardes tapes aux fesses...Faut-il en déduire que le respect de la hiérarchie s’arrête ou la guerre des sexes commence ?

A défaut de mettre l'intelligence en boite, on peut mettre les intelligents en tube
"Pour le spectateur de l'année 2015, le visionnage d'une telle ration tient au moins autant du voyage dans le temps que du trip faussement nostalgique." 

N'oublions pas, Rehte, incarnation du mal, fabriquant de boissons mousseuses caressant l'objectif de régner sur le monde. (Rien que ça) Et qui à défaut de pouvoir mettre l'intelligence en boite, se résoudra à mettre des intelligents en tubes … une sorte de Peponne qui serait passé dans les mains de Frank Provost. Hilarant ! Plus frappant, on découvre dans Operation Goldman des éléments qui apparaitront plus tard dans la séries des James Bond. Le projet lunaire, un rayon laser ou plus exactement et faute de moyen un rayon filaire.

Margueriti, touche à tout magnifique, passé du péplum au space opéra, du fantastique au western, s'offre avec le film d'espionnage une nouvelle mue et un nouveau terrain de jeu. Son «Operazione Goldman» s'autorise quelques décors d'un futurisme délicieusement surannée, la course folle d'une voiture miniature, une poignée d’explosion sous cloche tout comme la folle idée de scientifiques cryogénisés, et ce bien avant que la SF américaine ne s'essaye à la biostase et que l'industrie du surgelé ne viennent soulager la condition des ménagères françaises. Vous avez dit visionnaire ? Pour le spectateur de l'année 2015, le visionnage d'une telle ration tient au moins autant du voyage dans le temps que du trip faussement nostalgique. Espérons que les ventes de ce premier titre « Euro Spy » permettent à l'éditeur de poursuivre sur sa lancée... 

C'est officiel les 2B3 se reforment... 
Un œil sur le disque :

Aucune mauvaise surprise du côté d'Artus films qui livre «Operation Goldman» dans un beau master 16/9 au format scope 2.35 respecté.Une fois upscalé par nos dalles expertes, l'effort de Margueriti apparaît beau comme un astre. Pour les esgourdes, une piste française et une piste italienne sous titrée en français (sous-titre amovibles, c'est moderne !). Dans les suppléments, un film annonce, un diaporama d'affiches, de photos et l'indispensable présentation du film par Alain Petit. Le tout emberlificoté dans un digipack vendu 13€90. Quitte à rester dans le rétro, il faudrait être fou pour dépenser plus...