Julien Richard-Thomson "Mon cinéma de A à Z"


Parues le 24 mars dernier aux éditions Jaguarundi et distribuées à la force des biceps par Arcadès, les quelques cent quarante pages de «Mon cinéma de A à Z» de Julien Richard Thomson sont tombées dans nos mains velues à la mi mai. Ecranbis.com rattrape donc ses quelques wagons de retard d'une chronique quasi estivale, arrachée à la farniente et aux doux parfums des fleurs...

"Julien Richard Thomson serait-il devenu l'étendard du Z français par accident ? La réponse se dessine non sans humour au fil des pages d'une autobiographie alphabétique aussi inattendue que drolatique... tantôt tendre, tantôt acide."


«J'ai toujours bien aimé Julien Richard Thomson»... Peut être parce que le personnage est ancré dans mon passé et mon passif de lecteur de Mad Movies. Même si paradoxalement, son heure de gloire dans la presse spécialisée française correspond précisément au moment où je la lisais beaucoup moins... pour ne pas écrire plus du tout. Sans doute par ce qu'il faillit me mettre (involontairement il va sans dire) «dans l'embarras» lorsque votre site web préféré devait ramasser une balle perdue dans le tumulte juridique qui accompagna la sortie d'une de ses œuvrettes. Nous n’avions mis en ligne que le visuel et les quelques lignes de synopsis que le service presse de l'éditeur avait alors bien voulu nous transmettre... Le billet ne devait résister plus de quelques heures à la une. Menacé de poursuites et invité à mettre la main à la poche, nous avions sauvé la mise en exposant notre bonne foi et notre promptitude à mettre en œuvre l'oubli numérique en espérant justement que l'on nous oublie également.

"Dans «Mon cinéma de A à Z», L'homme orchestre s'amuse de ses propres déboires artistiques, médiatiques et parfois juridiques, sans manquer de tailler du costard … sur mesure."


Mais la véritable raison de cette sympathie tient sans doute au fait qu'il existe un atome crochu, un gène identique et commun à tout cinéphile ayant plongé les mains dans cambouis. Que l'on réalise des films sans un rond, que l'on édite un fanzine dans sa cave ou que l'on sacrifie ses heures de sommeil sur le bûcher d'un site web, les combats ne sont certes pas tout à fait les mêmes, mais se ressemblent... Jusque dans le peu de reconnaissance, la condescendance voire les railleries (Jamais méchantes mais toujours piquantes) qu'ils génèrent. Pas découragé pour un sou, Julien s'attaque, quarante berges au compteur à un exercice littéraire hybride entre abécédaire et autobiographie. L'occasion pour celui qui incarna longtemps le cinéma fantastique «Fait à la maison» et une forme d'avant-gardisme (Thomson loin devant ! prévenait la télévision de l'époque), de revenir sur la curieuse genèse de ses films comme sur ceux qu'il n' a pas pu tourner. Dans «Mon cinéma de A à Z», il s'amuse de ses propres déboires artistiques, médiatiques et parfois juridiques, sans manquer de tailler du costard … sur mesure.

"On sera même surpris de le lire se réclamer de Lynch, Cronenberg...et non des joyeux bricoleurs yankee auxquels les plumes françaises le comparent plus volontiers. "


On ne s'étonnera donc pas de voir l'homme orchestre s'en prendre au mode de financement du cinéma français tout comme à l' aristocratie culturelle qui en tire d'une main les ficelles et de l'autre les bénéfices. Sans doute trop passionné pour s'autoriser au calcul, Julien Richard Thomson se targe jusque sur la quatrième de couverture d'être le seul cinéaste à ne jamais avoir bénéficié d'aucune aide publique. Pas dit que la pirouette stylistique ne ramène à lui ceux qui lui ont tourné le dos, mais ce petit pavé que l'on torche en deux joyeuses heures de lecture apporte outre de nouvelles informations sur ses petits chefs d’œuvres, un éclairage tout à fait nouveau sur le personnage.

Entre les lignes on décèle que l'étiquette DIY (Do it Yourslef) née dans l'arrière boutique des années 70 et du mouvement punk, depuis collée sur toute forme d'autoproduction, décrit sans doute moins les aspirations du cinéaste que sa faculté à composer avec l'existant. On sera même surpris de le lire se réclamer de Lynch, Cronenberg... et non des joyeux bricoleur yankee auxquels les plumes françaises le comparent plus volontiers. Julien Richard Thomson serait-il devenu l'étendard du Z français par accident ? La réponse se dessine non sans humour au fil des pages d'une autobiographie alphabétique aussi inattendue que drolatique... tantôt tendre, tantôt acide. En prime Christophe Lemaire et Jean Pierre Putters s'essayent à la préface de comptoir. 14€ TTC dans les FNAC comme sur le site de Jagarundi car il va sans dire que Julien s'est édité tout seul ! On ne refait pas ! 



Claude G