Deux salopards en enfer: critique et test DVD


Décidément en pleine bourre, l'ours d'Artus films se frotte à tous les genres et facettes du cinéma d'exploitations européen. Preuve en est, à peine a -t'il trempé ses mimines velues dans les pots du Peplum et du Polar Rital que nos platines affamées essuient une nouvelle rafale de galettes guerrières et infernales. Le cinéphile prolétaire doit-il dégainer le drapeau blanc ou la carte bleue ? Au péril de son temps libre, Ecranbis.com s'est faufilé entre les lignes ennemies pour dérober des disques de test et notre réponse est sans appel : La colombe s'est posée dans le champs, je répète la colombe s'est posée dans le champs.



Quatre ans avant «Mais ou est donc passé la 7e compagnie ?» de Robert Lamoureux, Tonino Ricci saute du fauteuil de porteur de café à celui qui le boit, d'assistant à réalisateur. Sur un scénario dont il partage le crédit avec Piero Regnoli (Le manoir de la terreur, l'avion de l'apocalypse, les vampires, Veuves excitées... oui tu as bien lu...), l'homme s'essaye à la reconstitution historique d’opérette avec un «Il dito nella piaga»  qui, passant comme un herpes de langue en langue, deviendra au gré des humeurs et inspirations "Deux salopards en enfer" (Pour la France) , "Les léopards arrivent" (suite à un léger problème de traduction en Allemagne:  arhr ! Sven, Zalopards Was is das ?  Neine Friedrich , es ist nicht Zalopards , es ist Léoparz ! ), «Les libérateurs » chez nos cousins d’Amérique, « La fièvre de la guerre » chez nos voisins anglais. D'ailleurs, vous aussi envoyez-nous vos propres titres, nous publierons les meilleurs.


Nous voilà accrochés aux cartouchières de deux soldats yankees victimes d'une moralité défaillante et par conséquent promis à l' ultime ascension sociale et céleste, comprendre au peloton d'exécution. Le jeune gradé Michael Sheppard (George Hilton), tout juste sorti de l'académie militaire, est chargé de leur ouvrir tout grand les portes du paradis, lorsqu'un commando de fritz a la bonne idée de débarquer et d'arracher les deux condamnés à mort au poteau et à leurs potos !  Dans le chaos de la fusillade, Sheppard parvient lui aussi à prendre la fuite. Il espère d'abord ramener les fugitifs à bon port avant de se résoudre à l'évidence:  L'union fait la force et  en territoire hostile , la force, ce n'est pas du luxe. Le trio s'installe dans le petit village italien de San Michele où ils sont accueillis comme l'avant garde d'une libération à venir. Ils ignorent encore que les troupes allemandes se préparent à envahir la petite cité, comme les croupes allemandes envahissent les plages en été. (Que de poésie mes amis , que de poésie!)


La chose débute par une tirade biblique et se termine par une citation larmoyante de John Fitzgerald Kennedy laissant présager l'expression d'un humanisme béat et dégoulinant. Par chance le propos de «Deux salopards en enfer » se montre à l'image du positionnement de l'Italie et du parti communiste français durant la seconde guerre mondiale, c'est à dire à priori changeant ou du moins  incertain. Bien sûr cette escapade va permettre à nos deux têtes de pioche de réveiller en eux quelques restes d' humanité et  de moralité, ce qui autorise Tonino à ouvrir la porte de son récit à quelques bons sentiments. Car bien sûr, on ne naît pas méchant, on le devient. Et les deux salopards sont au fond des victimes comme les autres. L'un est enfant de prostituée, l'autre porte le poids de l'esclavage sur ses seules épaules. Ce qui explique , excuse-t'il ? L'ébauche psychanalytique et philosophique s'arrête là, laissant le spectateur dans les ténèbres à chercher à tâtons un interrupteur qu'il ne trouvera jamais...



Noir c'est noir, le reste de ce que donne à voir « Il dito nella piaga » oscille entre existentialisme et pessimisme (Homo homini lupus est ), âpre vision du fait humain renforcée par un héros (George Hilton) qui n'en est pas un, puisque simple spectateur d'une tranche de guerre et d'une rédemption . Entre les lignes du script, Kinski en fait de deux tonnes, fou et brillant... Tout en se montrant bien démuni et fragile lorsque la jolie Daniela, jolie pintade ne souhaitant pas finir Catherinette, lui déclare sa flamme. «Bé.... » (oué c'est un américain du sud ouest) répond le soldat, le regard perdu dans l'abîme de ses propres pensées. Exploitatif d'un bout à l'autre et très accroché à sa star teutonne «Deux salopards en enfer» a beau  jouer de l'uniforme et de quelques tanks de passages dans le cadre, l'effort de Tonino peine  à dissimuler sa véritable nature, celle d'un western, genre dont la bobine est contemporaine. Western déguisé, caréné , mais western quand même. En ce cette édition DVD inattendue pourrait tendre les bras à un public plus large que prévu.



Un oeil sur le disque :

Pas d'entourloupe du côté de chez Artus qui livre la bestiole au format scope 2.35 d'origine dans un master 16/9 de qualité satisfaisante. Le tout s'accompagne d'une piste sonore italienne, d'une piste française et de sous titres, mais surtout d'une présentation du film par Curd Ridel. Pour le même prix,  l'éditeur propose un diaporama et un film annonce. Bonne pioche !