L'affaire de la fille au pyjama jaune: critique et test DVD



Depuis sa venimeuse édition de «Una lucertola con la pelle donna», le chat qui fume voit jaune (Ou orange le graphiste responsable de la jaquette n'ayant à priori pas tranché). Sans surprise ou presque, le plus félin et moustachu des éditeurs de l'hexagone revient se frotter à nos cannes, deux galettes dans la bouche. Ce sera «Gionata Nera Per L'Ariete» ( Journée noire pour un belier) et «La Ragazza Dal Pigiama Giallo» (L'affaire de la fille au pyjama jaune). L'esprit de contradiction qui transpire de ces immodestes colonnes numériques me pousse à commencer par le second... Un peu pour faire chier (c'est vrai) mais surtout puisque celui-ci, tombé du ciel à l’extrême limite du genre, mérite de part sa qualité de «giallo qui n'en est pas vraiment un» une attention toute particulière.



Celui ci a pour ainsi dire tout pour plaire, un titre à coucher dehors pour commencer, établissant presque malgré lui une filiation incertaine entre ses 97 minutes et la vague des Giallis ou plutôt le Giallo en qualité de genre. Hier populaire, aujourd'hui bobohisée., la formule, si formule il y a, eu le mérite d'enchanter de la plus morbide des manières le cinéma d'exploitation italien, lui offrant un terrain de jeu unique et original, une route parallèle au Psycho Thriller américain et peut être même des chemins croisés.(Mais je m'égare) Arrivé sur les écrans italiens au crépuscule de l'année 1977, L'affaire de la fille au Pyjama jaune ne fait peut être pas encore office de voiture balais mais se soustrait déjà en partie aux codes giallique tout en gardant les pieds dans le genre par des efforts d'esthétisations tout à fait remarquables et jusqu'ici assez peu remarqués par les cinéphiles français puisque la bobine est restée jusqu'à ce jour totalement invisible dans notre vieux pays à la mentalité si étroite mais je m'égare à nouveau.


L'Australie, c'est beau comme Palavas, une gamine schizophrène déambule sur la plage en discutant avec son petit doigt et en écoutant du Amanda Lear. Stupeur, les plages australiennes ressemblent un peu à la casse auto du coin...Dans une vieille carcasse décrépie , réalisant le rêve suppliant du vieux George, un corps en pyjama, une balle dans le cou, un coup de cric dans la ganache, la couenne défigurée par les flammes. Ils voulaient être sûrs qu'elle soit bien morte, se dit le spectateur...Avant de se raviser... il y a des gens qui n'aiment vraiment pas Amanda Lear. L'instant d'après, le récit passe par la case morgue, le jeune flic y voit l’œuvre de pulsions ordinaires, le vieux flic devance Michel Onfray de quelques décennies : Freud Salaud ! Le décors est planté.


Et le décors c 'est un véritable fait divers datant des années 30. L'effective découverte d'un corps sans visage sur la plage et l'idée saugrenue d'un officier de police: «Bah on pourrait exposer le cadavre, quelqu'un reconnaîtra bien son cul...». Peine perdue, nul n'identifiera le postérieur mais le cinéma italien flairera dans cette déclinaison fessière du portrait robot , un concept porteur. «Ça pête » aurait déclaré Rafael Sánchez Campoy, «ça sent bon» lui aurait répondu Flavio Mogherini . Le 7 art, messieurs dames, tient qu'on se le dise à bien peu de chose et les affres de la création sont parfois du vent. Stratèges, les deux italiens concoctent un scénario entremêlant artificiellement deux récits faussement parallèles qui se rejoindront ( Ah bah ça alors!) dans le dernier quart d'heure du métrage. Il y aura pour ainsi dire L'enquête avec un grand A et l’enquête avec un grand Q ...C'est à dire les errances de l’enquêteur ( et non du major) Thomson et les errances sentimentales de Glenda. Thomson ne sait pas où donner de la tête, Glenda ne sait pas à qui tendre la touffe... Qu'est-ce que c'est bien écrit !



L’intérêt est de toute façon ailleurs ou plutôt essentiellement formel. Oui... L'affaire de la fille au pyjama jaune est parfois touché par la grâce, cette grâce qui donne la parole aux images, sans que l'on soit capable d'en saisir le moindre mot et qui nous abandonne cependant avec la certitude que tout est dit. (Un peu comme cette phrase d'ailleurs … ). Oui, cela suffit à faire de L'affaire de la fille au pyjama jaune un bon film, à chasser de nos mauvais esprits les quelques tours de passe passe tentant de nous faire croire à un tournage 100% australien et aux yeux bleus Schtroumpfs de Howard Ross.

Un œil sur le disque :

Un beau digipack, un joli master flat, une piste italienne sous titrée en français, une poignée de bandes annonces et un interview d'Howard Ross. Le chat ne se paye pas la tête du client. Et à 12€ ça fait pas cher la soirée pyjama. Achetez le, l'éditeur a vraiment besoin d'un nouveau rasoir...