Scream a-t-il dépoussiéré ou enterré le slasher en tant que genre? La question est sans doute moins anodine qu'il n'y paraît... Car au fond, de la manière dont on se saisit de l'oeuvre de Craven, découle un certain rapport au cinéma, volontairement tourné vers l'avenir ou arbitrairement vers le passé. Une chose apparaît toutefois comme d'ores et déjà acquise, en 1996 la saga horrifique a indiscutablement relancé une production devenue moribonde à la fin des années 80. Dans l'ère post Scream, tueurs masqués, étudiants tailladés font leur grand retour dans les salles obscures... comme dans la petite lucarne. Mais curieusement traversé par un sous discours cinéphilique, le film de Wes Craven aura eu un autre effet, tout aussi spectaculaire, sur des millions de volontaires au grand frisson. En tendant une invitation à remonter à la source du genre, les aventures lycéennes de Sidney Prescot on poussé des nouvelles générations de spectateurs dans une exploration quasi généalogique d'un cinéma qui tranche!
Dans son second opus, Craven se permet même de caresser du bout du couteau et par l'intermédiaire de son personnage Randy, une bobine oubliée, «Final Exam»... Du moins dans sa version originale, le doublage français ayant par erreur retitré l'objet du délit par : Examen sanglant. (Autour de la minute 60, à vos DVD !). Car oui, Final Exam non content de faire les beaux jours de la vidéo locative outre atlantique, aura droit à une VHS francophone portant le sobriquet d' « Examen Final » (Embassy Home Entertainment, distribution Polygram). Une péloche arrachée aux plaisirs exclusivement magnétiques par UNCUT MOVIES et sur laquelle nous nous penchons aujourd'hui.
Le moins que l'on puisse dire c'est que même sorti dans les salles américaines au bon moment, c'est à dire un mois après Le tueur du vendredi ( Friday the 13 part 2), Final Exam ne lancera ni la carrière de son réalisateur scénariste, ni celles de son casting de jeunes acteurs débutants. Jimmy Hudson dont le quasi seul fait de gloire est à ce jour d'avoir co écrit le screenplay du sympathique «2 flics à chicago» (1986) de Peter Hyams, mettra six ans avant de retoucher une caméra et le genre (ce qui s'appelle faire d'une pierre deux coup)s pour une comédie horrifique dans l'air du temps (nous sommes alors en 1987) « My Best Friend Is a Vampire ».
Pour Cecile Bagdadi , Ralph Brown et John Fallon, respectivement Courtney, Wildma et Mark, Final exam sera même la première et dernière expérience cinématographique. Anna Robbins (Lisa) continuera elle à sévir dans les soap larmoyants (Santa Barabara, les feux de l'amour). Quant à Joel S. Rice (Radish) , à défaut d'embrasser une carrière de comédien, il deviendra un producteur de téléfilm relativement prolifique. Non, les seules curiosités réalisationnelles de notre péloche du jour sont à chercher dans les profondeurs abyssales de son générique et de sa bande originale avec un montage signé John A. O'Connor (fils de Kendall O'Connor, connu pour avoir travaillé sur bon nombre des films d'animation estampillés Disney) qui se fendra plus tard de quelques cut remarquables : Savage Streets, les rues de l'enfer ou The Dark Side of the Moon (Parasite pour la France) en tête. Nous retiendrons également un beau score synthétique composé par Gary S. Scott qui œuvrera, lui, pour la télévision américaine en écrivant des chansons pour la série Fame ou des musiques pour Freddy's Nightmare (Freddy: le cauchemar de vos nuits).
A défaut d'entrée fracassante dans l'histoire de l'épouvante couchée sur pellicule, «Examen final» offre une définition plutôt intéressante de ce qu'est le cinéma bis ou le cinéma d'exploitation. Un art du clonage, de la réplique et de la resucée. Aucun doute n'est permis, Le tueur d'Huston fait écho au Michael Myers de Carpenter, au Jason de Cunningham. Mieux il épouse partiellement les contours et les artifices d'un genre que les deux réalisateurs précédemment cités ont réussi à cristalliser... Nous aurons donc droit à un Boogeyman d'anthologie, muet comme une carpe, fort comme un turc, des jeunes gens odieusement massacrés, une pauvre et innocente survivante qui devra affronter la bête dans une épique scène finale. L'intérêt de l'a chose est toutefois à chercher ailleurs, à l'extrême opposé même, c'est à dire dans ce qui différencie Final Exam des slashers précédents et à venir, pour ne pas dire dans la transgression...
A la vision de ces quelques 80 minutes, une première chose saute aux yeux. La structure narrative de «Final Exam» échappe au diktat du «Body Count». Son double homicide introductif mis de côté, une très consistante partie du métrage tend vers la comédie étudiante américaine classique. Fraternités, bizutages, triches aux examens, flirts, intellos, drôles de profs et forts en sport. Huston ne nous épargne rien ou pas grand chose. Mais il suffira de peu, quelques notes d'un thème évoquant celui d'Halloween, une ombre passant furtivement dans le cadre pour faire comprendre au spectateur que quelque chose cloche et que le mal rode dans cet univers parfait peuplé de jolies filles et de jeunes gens passablement excités. Par cette relative économie de moyen ou ces moyens très économiques (on vous laisse choisir), Final Exam échappe de peu à la teen comedy tout en retenant son propos horrifique. Un curieux entre deux!
Il faudra même attendre la 54e minutes pour que notre psycho killer joue à nouveau du couteau et que le film de Hutson tombe par conséquent le masque, offrant à nos mirettes fiévreuses un «Slasher» plus assumé. Mais étonnamment , ce qui s'annonce comme une prévisible partie de bowling humain va tourner en partie le dos à l'une des marques de fabrique du sous genre. L'effusion gore. Ce au profit d'une autre constante du Slasher : sa mécanique huilée... Son jeu de chat et de souris, de chasseur et de proie. Bref sa nature de Tom et Jerry "live" pour adultes. Violent sans être sanglant, Final Exam présente une autre exception de taille. Nous ne saurons rien de rien de son mystérieux tueur et encore moins de ses morbides motivations. Aussi finit-il par incarner le mal dans ce qu'il a de plus gratuit et implacable. Un pur soldat de la mort. Un concentré de Mr Méchant...
Cinématographiquement classique mais soigné, cette ballade estudiantine et mortelle souffre certes de quelques maladresses. Un cast sans doute trop vert et surtout une concentration de sa charge horrifique dans sa dernière demi heure. Mais ses démarcations multiples en font une œuvre très singulière et par conséquent intéressante Le cinéphile déviant et le vidéolégiste, remontant le fleuve sanglant du «Pyscho killer» à contre courant, se doivent donc de marquer la pause, au moins pour apprécier la rareté et la saveur délicieusement début 80's de la chose.
Le disque :
Uncut Movies nous propose de découvrir le film dans un transfert très correct, accompagné de mixages français (sacré doublage au passage !) et anglais, ainsi que de sous titres. En prime, des interview des acteurs : Joel S. Rices (Radish), Cecile Bagdadi (Courtney) et Sherry Willis Burch (Janet), un trailer, une galerie de photos et des bandes annonces éditeur. Comme touts les autres titre Uncut movies, le tirage de cette galette a été limité à 1000 exemplaires. A commander du côté du site http://www.uncutmovies.fr/