Une bande de grecs en quête d'éponges pour effacer leur dettes... Non il ne s'agit pas là de la dernière parade du gouvernement d'Antonis Samaras pour échapper à la crise mais bien du pitch de «Tempête sous la mer», bobine noyée dans les profondeurs de l'histoire du cinéma, qu'Artus film nous propose d'explorer dans le cadre de sa collection «Les Grands Classiques Hollywoodiens». La chose devrait être disponible début septembre dans toutes les boutiques vidéo dignes de ce nom. Les impatients peuvent déjà commander la chose sur le site de l'éditeur. Ecranbis.com est parti en éclaireur au beau milieu de l'été...
Chronique:
Cinquième film de l'oscarisé Robert D. Webb (Oscar du meilleur assistant réalisateur pour «In Old Chicago»), projeté à Cannes en 1954, «Tempête sous la mer» présente un intérêt cinéphilique tout particulier puisqu'il s'agit du troisième film en cinémascope de l'histoire du cinéma. Dans les 50's, alors que la fréquentation des salles obscures chute de façon vertigineuse, Hollywood se lance dans une course technologique donc l'unique but est la reconquête d'un public pris dans les filets de la télévision. Tous les appâts seront permis: Relief, projection panoramique … C'est d'ailleurs sur cette dernière piste que la Fox va s'élancer. Le studio séduit par le «Cinérama» de Waller entend trouver un procédé moins contraignant (Le Cinérama pose de nombreux problèmes de production et de projection) et se tourne vers la France, plus précisément vers l'hypergonar, invention du chercheur Henri Chrétien. La chose date de 1927 et n'avait jusqu'à ce jour pas véritablement trouvé preneur. La major en rachète les droits pour développer son propre brevet. Le cinémascope naît officiellement en 1953 au Roxy Theater, premier cinéma New Yorkais à projeter «La tunique ». (Qui ne fut étrangement pas le 1er film en cinémascope tourné mais c'est une autre historie) Le succès va convaincre les dirigeants d'enfoncer le clou et les exploitants d'équiper leur salle...
Autant le dire, la promesse de «tempête sous la mer» est d'abord, celle d'un spectacle dépaysant et immersif, s'offrant les relief sous marins de la Floride comme toile de fond. Comprenez par là que son récit s'avère au mieux parfaitement anecdotique au pire un simple prétexte à l'enfilage de scène sous marines au format panoramique. A ma droite, les Petrakis père (Gilbert Roland) et fils (Robert Wagner), famille d'immigrés grecs très occupée à rembourser ses dettes en explorant les récifs corailiens... A ma gauche, les Rhys, une famille de pécheurs anglais spécialisés dans le coquillage. Une sombre histoire de territoire va mettre le feu aux poudres et surtout permettre à Tony, le fils Petrakis, de faire la connaissance de Gwyneth, la fille Rhys. Le jeune grec étant par nature plutôt tactile (Ah les vacances à Mykonos ! Parlez en à Frank Dubosc...) et la jeune anglaise plus chaude qu'un pudding sortant du four, la parade amoureuse a l'avantage ne de pas s'éterniser ! Mais ce coup de foudre instantané laisse également présager de la tempête à venir… Autrement dit, Tony ne videra pas le coquillage de Gwyneth sans faire de vagues !
Sur cette base sympathiquement «Romeo-et-juillettesque», Webb construit la parfaite bobine aventuro familiale. A la légèreté du propos répond un casting de poids. Gilbert Roland (l'éternel et parfait étranger), un Robert Wagner débutant (Beneath the 12-mile reef est sont 6e film), Peter Graves (Jim Phelps la série Mission impossible) sans oublier Terry Moore et son nez joliment retroussé. Quant aux scènes aquatiques qu'on imagine fort impressionnantes pour le public de l'époque, que dire si ce n'est qu'effectivement, elles ont sans doute perdu un peu de leur sensationnel (de l'eau à depuis coulé sur les écrans et le visionage sur petit écran supprime tout effet immersif ) mais qu'elles ont paradoxalement gagné dans ce duel avec le temps un certain charme... (Passage forcé et guidé de quelques spécimens de la faune aquatique dans le cadre, etc). L'amateur de petit plaisir visuel et auditif désuet retiendra en tous les cas la très belle séquence de l'attaque de pieuvre géante (La première lacérée par le scope ! ) tout comme le score inspiré de Bernard Herrmann (Psychose, sueurs froides, voyage au centre de la terre, taxi driver).
Test technique :
Artus propose de découvrir la chose dans une copie au format 2.35 dont la qualité est malheureusement plutôt dégradée. La péloche est en effet très griffée et les changements de bobine particulièrement douloureux. Pour nous consoler, l'éditeur propose une VF en plus de la traditionnelle piste anglaise sous titrée. Une piste qui présente un détail amusant, les comédiens doubleurs ayant visiblement un peu de mal à «prendre» l'accent de nos pêcheur immigrés, nous avons droit à une étrange tentative plaçant la Grèce à mi chemin entre Vintimille et Marseille. Reste que l'existence de cette édition, bien qu'imparfaite sur le plan technique, suffira à ravir le cinéphile curieux et collectionneur. 3/5