Evil dead: critique et test DVD


Pas folle la guêpe, Sony Pictures Home Entertainment profite d'un anniversaire et de la sortie en salle d'un attendu remake pour proposer une nouvelle édition d'Evil Dead aux vidéovores français. La chose est disponible en DVD single et Bluray depuis le 6 mai dernier à prix sympathique. Comptez 14€90 que vous choisissiez la version HD ou pas. Ecranbis.com se devait de souffler les 30 bougies du film culte avec une chronique pas comme les autres… C'est chose faite !


En 1985, votre serviteur avait tout juste 10 ans. Chaque samedi après midi commençait par un attendu rituel, le déplacement familial au vidéoclub le plus proche, en Renault 16 s'il vous plaît. Sur place, ce n'était ni le Pérou, ni Byzance et l'employé gérant semblait ne connaître qu'une seule phrase, qu'il se plaisait à répéter à tout client osant lui demander un film «Ah non désolé, il est dehors». Et oui à l'époque, une cassette, il fallait parfois la réserver plusieurs semaines à l'avance, ce qui donnait de fait à son visionnage une certaine valeur... Non le choix n'avait rien de pléthorique... Mais il fallait de plus composer à mon comité d'approbation familial. Chaque proposition de ma part devait passer par le sentence de deux jurés implacables, scrutant les jaquettes à la recherche du moindre détail répréhensible ou condamnable. «Ah non celui là il n'est pas pour toi» m'entendais je dire de mes géniteurs censeurs. Et je devais repartir bougonnant dans les rayonnages reposer le fruit des mes recherches. Autant vous dire que mes plaisirs magnétiques se limitaient à l'aventure tendre, au fantastique gentillet et à la comédie sage (Tout le monde n'a pas la chance d'avoir des parents libertaires) mais déjà dans le fond du magasin une affiche placardée à la va vite me faisait dangereusement de l'œil.


Un homme au visage ensanglanté, une tronçonneuse à la main, une brune hurlante en petite tenue lui tenant la jambe, affrontait une armée de squelettes. Je devais apprendre quelques années plus tard que cette alléchante photographie n'était nullement extraite du film. Coup de couteau dans mon petit cœur de cinéphile adolescent. Je découvrais sur le tard et par l'intermédiaire d'une VHS achetée par correspondance (99 francs, estampillée Hollywood vidéo, elle trône encore dans ma collection), l'objet de tous mes fantasmes. Pour ne rien vous cacher, je fus un peu déçu. Beaucoup même et il fallut quelques années avant que je me réconcilie avec le sulfureux premier jet de Sam Raimi. Et non ! Evil Dead, n'était pas le film que j'attendais avec fébrilité, pas celui que j'avais imaginé dans mes cauchemars les plus fous, pas celui dont l'affiche remplissait de curiosité et d'effroi le petit garçon du vidéo club... en 1985.

Du sang a coulé sous les ponts, des kilomètres de bobines frelatées ont défilé sous mes yeux et mon splendide objet de collection eu lui tendance à prendre la poussière. Au printemps 2003, Evil Dead s'invite à nouveau dans les salles obscures (sous le fallacieux prétexte d'un nouveau doublage et mixage Dolby 5.1). Lisant et relisant les dithyrambiques tirades de la presse spécialisée et surtout bien décidé à comprendre ce qui avait pu m'échapper, je décidais d'affronter à nouveau la bête et pour commencer la caissière d'un cinéma de province. «Bonsoir, un pour Evil Dead.» Et me revoilà parti pour une projection épique au milieu d'une bande d'ados survoltées et rigolards.


Ne rigolez pas, ce soir là, seul dans cette marée de petits connards insolents mal accompagnés par leur éducateurs idéologues et dépassés par la situation, j'ai compris beaucoup de choses. Premièrement que le Home cinéma n'était pas sans vertus ni avantages, deuxièmement qu'une œuvre de cinéma est aussi un produit générationnel. Qu'on le veuille ou non, Evil Dead est sans doute moins un film d'horreur qu'une œuvre punk, spontanée, orgiesque et provocante. Une pièce de théâtre destroy filmée, sonnant la cloche de l'outrance tout en perdant son maigre scénario dans les bois. Acting amateurisant, effets spéciaux bricolés et script égaré, rien ici ne tient debout, ou plutôt tout cela ne tient debout que par la folle énergie d'un gamin de 20 ans et de sa rage à filmer l'improbable entre quatre murs de bois. Cette œuvre excessive pour ne pas dire adolescente, le cinéphile ne pourra s'empêcher de la rapprocher d'un certain «Bad Taste» que Peter Jackson réalisera quelques années plus tard. Un parallèle facile tant finalement les deux hommes ont suivi le même parcours... voir les mêmes fausses pistes.


Mais il y a autre chose dans le film de Raimi, quelque chose qui transcende sa nature de cartoon horrifique survolté... On imagine sans peine les fantasticophiles de l'époque découvrant mésusés un brutal bricolage cinématographique fait sans grands moyens par des jeunes de leur âge. Evil Dead a définitivement entrouvert une porte celle du Do It Yourself, rendu cette voie praticable et par conséquent changé à jamais le visage du cinéma fantastique indépendant. C'est cela que je retiendrai d'Evil Dead aujourd'hui, une montée de sève, un manifeste pour le cinéma à venir, une œuvre presque libératoire... Mais à replacer dans son contexte. C'est peut être cela qui m'avait jusque là échappé et sans doute cela qui est resté hors de portée des Gremlins boutonneux et mal élevés de ma séance de 2003...


Il serait pourtant malhonnête d'écrire qu'Evil Dead, vu 30 années après sa réalisation, n'a pas pris une ride. Le monde de l'horreur sur pellicule est traversé depuis ses origines par une dynamique implacable : une inflation douce mais imparable de son langage visuel. Il suffit pour s'en convaincre d'insérer dans nos lecteurs la galette du Frankenstein de Whale. Comment face à ce spectacle si graphiquement inoffensif, un kid des années 2000 peut-il s'imaginer des spectateurs sortant horrifiés des salles obscures 80 ans plus tôt ? Bien sûr, la folle péloche de Raimi nous est infiniment plus proche et son discours définitivement plus explicite pour ne pas dire toujours en phase. Dit autrement, il ne s'agit plus chercher dans Evil Dead, l'opéra de la terreur promis par son titre Québécois ni de pointer du doigt sa dimension foraine datée mais bien de déterrer l'une des incontestables matrices du cinéma horrifique des années 80, d'aujourd'hui et sans doute de demain encore. Vous avez dit un classique ?


Le disque :

Evil dead avait jusqu'ici bénéficié de deux éditions Zone 2 françaises par TF1 Vidéo. La première était un double collector accompagné d'un livret de 80 pages, la seconde une simple galette n'incluant aucun bonus si ce n'est deux pistes de commentaires audio. Ces disques avaient comme particularité de proposer une version recadrée en 1.85 du film (dont le format original était 1.37) et de n'embarquer (du moins dans ses options francophones) que le nouveau mixage réalisé par Metropolitan pour la ressortie en salle de 2003. Coup dur pour les puristes qui non content de perdre une partie significative de l'image par rapport à la VHS (elle en 4/3) devaient se faire à de toutes nouvelles voix.

 Il conviendra toutefois de relativiser la déconvenue, le recadrage ayant été validé par Sam Raimi en personne, et le doublage étant contrairement à celui des «Dents de la mer -Edition 2005» plutôt réussi. On se demandait par contre à l'époque ce qui avait pu retenir l'éditeur de ne pas inclure la piste française d'origine, d'autant plus qu'elle était disponible sur une édition américaine. Nous risquons de nous le demander encore longtemps car cette édition 2013 signée Sony propose elle aussi un transfert 1.85 et le doublage de 2003.

Edition TF1 Vidéo
Edition Sony 2013


La bonne nouvelle c'est que Sony a visiblement utilisé le master HD réalisé pour la précédente sortie Bluray du film. On y gagne donc vraiment par rapport à l'édition TF1 Vidéo qui présentait une compression douloureuse (rendant l'upscale pénible) et des couleurs douteuses. On récupère par contre un fourmillement omniprésent mais l'image reste incontestablement mieux définie et naturelle.


Edition TF1 Vidéo - Cliquez sur l'image pour voir en grand
Edition Sony 2013 - Cliquez sur l'image pour voir en grand
Dans la cabane à bonus : 

Un  nouveau commentaire enregistré en 2009 par Sam Raimi, Bruce Campbell et Robert Tapert


Un par un nous vous aurons (53 minutes):
UNe découverte de la saga produite par Anchor Bay

Les trésors de la salle de montage (Treasures from the cutting room floor) :
1 heure de scènes coupées ou plans non retenu dans le montage final

A la Découverte d'Evil Dead (Discovering Evil dead) :
Un document produit par Blue Underground de 13 minutes sur la sortie d'Evil dead en salle et en vidéo

Jeu  de question réponse ( 12 minutes) :
Interview du cast d'Evil Dead en public.

Test de maquillage ( 1 minutes)

Notes : Tous les suppléments sous en V.O.S.T.