Sorti discrètement (pour ne pas dire dans le secret de la confession) en juillet dernier dans les salles françaises, le Moine, dernier effort de Dominik Moll ( Harry un ami qui vous veut du bien) a partagé la critique. C'est le 23 novembre prochain, que cette adaptation du roman gothique scandaleux (en son temps, précisons-le) de Matthew Gregory Lewis, s'offre un deuxième office vidéastique du côté de chez Diaphana. Et c'est avec un peu d'avance qu' Ecranbis.com a pu poser son regard bienveillant sur cette galette bénite et vous invite à vous recueillir devant cette chronique.
Synopsis :
Abandonné à la naissance aux portes du couvent des Capucins, Ambrosio est élevé par les frères. Devenu un prédicateur admiré pour sa ferveur et redouté pour son intransigeance, il se croit à l’abri de toute tentation. L’arrivée d’un mystérieux novice va ébranler ses certitudes et le mener sur le chemin du péché…
Critique :
Lorsque Dominik Moll referme le le livre de Matthew Gregory Lewis, il doute pour commencer de son adaptabilité cinématographique. (Le roman a pourtant été porté à l'écran une première fois en 1972 par Franco Nero). Mais le potentiel narratif et les promesses visuelles d'un film d'époque vont finir par le convaincre. Il travaille alors seul sur une première version du scenario, extirpant du roman ce qui servira de structure et de squelette à son film. Insatisfait par cette mouture, il invite Anne-Louise Trividic à insuffler un peu plus d'humanité et de profondeur à ses personnages et spécifiquement à celui d'Ambrosio. Moine à travers lequel Lewis (alors âgé de 19 ans) réglait ses compte avec l'église et le catholicisme. Exit le cynisme , l'Ambrosio de Moll, campé par un Cassel à contre emploi, y croit dur comme fer. Un moine entier au point d'être intransigeant, tourné vers les cieux et presque indiffèrent à ses semblables.
L'apparition de Valério, énigmatique créature masquée va plonger le film dans les couloirs du Thriller religieux et pousser Ambrosio dans les escaliers de sa propre déchéance. Tandis que notre moine passe de la crise de foi à la descente aux enfers, le film de Moll dévale avec mimétisme les pentes du fantastique. Car à travers Valério, personnage « Matriochka », à la fois homme, femme, sorcière, c'est bien entendu le malin qui piège Ambrosio propulsant « Le moine » bien au delà d'un simple récit de la perversion, ou d'une banale tentation de la chair, sur les terres obscures du conte mystique aux accents Faustiens. Ce qui n'aurait pu n'être qu'un «polar dans le bénitier» louchant sur le Nom de la Rose, plonge donc dans un surnaturel bienvenu...
L'écrin cinématographique offert par Dominik Moll hésite lui aussi entre le meilleur et le pire. Parfois à la limite du téléfilmique, mou de la soutane, parfois superbe, fulgurant même! Une sorte de grand huit permanent, où Cassel décidément beaucoup plus crédible une fois corrompu, finit par s'imposer. On retiendra de cette visite monastique, de sombres mais somptueux rêves éveillés, scènes atmosphériques traversées par un érotisme bestial, un sens de la révérence au cinéma fantastico-gothique, courbettes visuelles que certains jugeront sans doute un peu forcées, mais qui habillent ce saut de l'ange spirituel avec une classe certaine.
On finit par se dire que « Le Moine » aurait gagné à moins de retenue dans l'accompagnement de son récit dans le fantastique. Comprenez à embrasser le genre de façon plus formelle, visuelle et assumée. Mais Dominik Moll a fait le choix inverse, celui de rester entre deux eaux. En résulte une péloche d'ambiance réussie mais trop bien accrochée à la montagne pour espérer donner le vertige. Reste un bon film, et disons-le un des rares efforts français à tenir la route de la fable fantastico-gothique... 14/20.
Test Technique :
La galette argentée qui nous a été envoyé délivre une image juste superbe en 2.35. Un effort accompagné de deux mixages français ( Simple Stéréo et DD5.1). Le rayon supplément se trouve plutôt achalandé : une bande annonce, un Making Of copieux et quelques documents de production ( StoryBoard, dessin préparatoire). Un disque fort recommandable !