Après une dizaine d'années de silence radio, Big John est de retour avec «The Ward». Un come back qui a joué avec les nerfs des fantasticovores français ( Et ce n'est rien de le dire). Vous aviez espéré découvrir la chose sur grand écran ? Mauvaise pioche ! Vous devrez vous contenter d'une sortie vidéo. En guise de consolation, Metropolitan dégaine des éditions DVD/Bluray à la hauteur de l’événement et ouvre l'aile la plus sombre de cet hôpital pas comme les autres. Une galette argentée étant apparue dans notre cellule capitonnée, Ecranbis.com est en mesure de vous parler dès aujourd'hui de la dernière prescription du Dr Carpenter...
Synopsis :
En 1966, dans l’Oregon, Kristen est arrêtée par la police après avoir mis le feu à une ferme. Murée dans un état de stupeur, le corps couvert d’ecchymoses et incapable d’avoir le moindre souvenir de ce qu’il s’est passé, Kristen est enfermée dans un hôpital psychiatrique pour jeunes filles. Au sein de l’institution, les autres détenues : Emily, Sarah, Zoey et Iris, vivent toutes dans la terreur d’un fantôme qui aurait été vu la nuit dans les couloirs. Kristen, qui est bien décidée à s’échapper, n’y prête aucune attention mais va bientôt comprendre que la créature qui hante l’institution détient peut-être la clé pour comprendre son passé…
Critique :
Écrire sur Carpenter n'est pas chose aisée tant le cinéaste et sa rutilante filmographie ont été décortiqués dans les colonnes (papier et numériques) de la presse spécialisée. Que reste-t-il donc à dire qui n'ait pas déjà été dit sur l'apport massif, indiscutable et par ailleurs indiscuté de Carpenter au cinéma de genre, sur son œuvre monolithique ? Combien de cinéastes peuvent-il se targuer d'avoir non pas marqué le fantastique d'une trace indélébile, ni même de plusieurs, mais d'avoir littéralement creusé un sillon dans lequel se sont engouffrés des générations de réalisateurs? Le cinéma de Carpenter, reconnaissable en 2 plans, caresse encore aujourd'hui la mémoire des cinéphiles comme son scope acéré éffleurait les rues d'un NYC futuriste dans Escape from New York. Mais depuis son impopulaire et pourtant rétrospectivement réussi western martien (Ghost of Mars - 2001), Big John semblait avoir raccroché les gants... Ne retrouvant les plateaux de tournage que pour y distiller son savoir faire ( The Fog, le remake) ou collaborer aux «Masters of Horror" de Mike Garris dont il réalisera deux épisodes au milieu des années 2000.
On cherchait dans ses plus récents efforts les signes de l'épuisement (le final d'Escape from L.A.), on le disait souffrant, on a même un temps perdu espoir. On craignait le pire. A l'image de Snake Plisken, Carpenter avait-il renvoyé le petit monde du cinéma U.S. à sa propre folie. Ne comptez plus sur moi... Le message nous semblait évident. Puis est venu The Ward, un étincelle dans nos yeux d'orphelins. Non Big John ne nous a pas abandonnés... Carpenter va revenir. Et pour les fantasticophiles français, le roulement de tambour va être interminable. The Ward est d'abord projeté à Toronto en 2010, il sort en Angleterre au début 2011 et finit (péniblement) par trouver un distributeur aux États Unis où il sort en juillet de la même année. Sur la planète France, on patiente de longs mois dans l'espoir de découvrir le film sur grand écran mais la pavillon de Carpenter est fermé à double tour.
Cette double attente ne va-t-elle pas finir par nuire à "The Ward" et plus exactement à la réception du film par le public français ? La question est d'autant plus épineuse que le réalisateur fait avec ce nouvel effort un retour sur la pointe des pieds, abandonnant l'écriture (un scénario apporté sur un plateau), la composition de la b.o. (Cette fois confié à Mark Kilian) et pour la première fois de sa carrière la sacro sainte Panavision. Côté budget, The Ward solidement accroché aux rails de l'économie (un budget d'à peine 10 millions de dollars US), oblige Carpenter à enfermer ses personnages et son poltergeist meurtrier dans les couloirs d'un hôpital psy ...Difficile de faire moins bandant !
Et c'est peut être là que Carpenter prouve une nouvelle fois son indiscutable talent de réalisateur. Si "The Ward" n'a rien d'un Carpenter majeur, si on y retrouve pas complètement ou de façon altérée le langage du cinéaste, force est de constater que sur un pitch de psycho ghost movie très classique et pas forcement excitant, Big John a su construire une œuvre qui fonctionne. Nous sommes face à un petit film d'horreur, certes, mais un petit film d'horreur réussi. La quête identitaire de Kristen et de ses doubles mise de côté, The Ward vaut le coup d’œil ne serait-ce que pour retrouver l'aisance du cinéaste à lécher les murs de lents mouvements de camera, et sa vision du monde fenêtrée par le scope. Le plaisir partagé de poursuive la jolie Amber Heads en nuisette dans les bois ou dans les sous-sols de ce terrifiant pavillon. Pour le plaisir des yeux donc... Et celui d'écouter une histoire... Peu importe laquelle pourvu qu'elle soit bien racontée.
Alors qu'une bonne partie de la critique hurle déjà au pétard mouillé, affirmons le haut et fort : Les fans de Big John sauront y trouver leur compte pour ne pas dire leur dose et "The Ward" finira, n'en déplaise à certains, par trouver sa place (Comme Ghost of mars) dans l'impressionnante filmo du maître. Une question de temps et rien d'autre ... En attendant, Ecranbis.com signe la fiche de sortie de ce patient d'un 14/20.
Test Technique :
Metropolitan offre à "The Ward" une édition DVD plutôt haut de gamme. La galette argentée que nous avons testée permet en effet de découvrir ce nouveau Carpenter avec une image d'excellente tenue en dépit d'un grain assez visible, le tout au format d'origine scope 2.35, il va sans dire. Rayon audio nous avons droit à deux mixages Dolby Digital 5.1 (Français et Anglais) aussi généreux que convaincants. A l'étage bonus: Un making of d'un petit quart d'heure un poil autopromo mais néanmoins sympathique, l'amusante présentation enregistrée par John Carpenter pour la première de "The Ward" au Toronto International Film Festival (TIFF) , une flopée de bandes annonces (Mother's Day, la locataire, Echo, Les nuits rouges du bourreau de Jade, Hell Driver, The Informers, Rhum Express, The Ward) et un commentaire audio (VOST) de John Carpenter et Jared Harris.