Livide : l'interview de Julien Maury et Alexandre Bustillo



En ce doux moi de mai 2012, Ecranbis.com a slalomé entre les ponts pour poser quelques vicieuses questions à Julien Maury et Alexandre Bustillo, heureux géniteurs de Livide qui sort en ce moment en Bluray et DVD....

Bonjour Julien et Alexandre, on commence par une question pour Mr Bustillo. On te l'a sans doute déjà posé un million de fois, mais passer de la critique à la réalisation, c'est un rêve pour beaucoup...On pourrait dire un rêve terrifiant. Est-ce que dans la façon dont tu as co-réalisé «Livide», ton passé de journaliste est rentré en compte ? Si oui comment ? Et du coup quel rapport as-tu aux critiques de "Livide" ? 

Oui, le terme « rêve terrifiant » est assez juste, car lorsque tu as été critiques de films pendant des années, tu te dis, à l’aube d’en faire un dans des conditions professionnelles, que tu vas être à ton tour soumis à la critique. Un juste retour des choses. Critique et réalisateur sont deux boulots biens distincts, même si l’un nourrit l’autre, d’une façon ou d’une autre. Mais de là à dire que mon passé de journaliste est rentré en compte dans ma façon de co-réaliser…honnêtement, je ne sais pas. Concernant les critiques, c’est simple : je suis comme tout le monde, j’aime les bonnes, les mauvaises m’emmerdent, sauf si elles sont intelligemment faites, comme ce fut le cas concernant celle de l’un de mes collègues de Mad Movies, mais elles m’emmerdent cinq minutes. Idem pour la galvanisation entrainée par les bonnes. On lit, on dit « cool » ou « fait chier » et on passe à autre chose.

On a l'impression que le cinéma de genre français se roule souvent dans les draps du «conte fantastique». On se souvient de Saint Ange, Le village des ombre, Derrière les murs...Et maintenant votre bobine. Comment expliquez-vous que la création de notre beau petit pays ne fonce pas tête baissée dans un cinéma d'exploitation pur jus ? Qu'est- ce qui vous a poussé sur ces rails là ? 

Concernant Livide, on ne s’est pas dit « faisons tel genre de film ». Non, on a juste imaginé une histoire qui, s’il fallait la cataloguer, entrerait dans cette catégorie du « conte fantastique ». Tout comme A l’Intérieur, qui se réclamait ouvertement du slasher américain, cinéma d’exploitation pur jus par excellence. Pour nous, tout découle donc de nos histoires.
Pour l’exemple, nous venons de finir un scénario qui n’entre dans aucune des deux catégories citées plus haut.

D'ailleurs que pensez-vous du cinéma fantastique français ? Seriez -vous du genre à militer le genre «Made in France» ? Ou seriez-vous partant pour la Green Card et /ou comme Aja, la réalisation de films américains en Amérique ? 

Bien sur que nous sommes de fervents partisans du genre made in France. Artistiquement, nous avons dans notre pays tout le talent nécessaire, que ce soit en matière de direction artistique ou de SFX pour faire des films artistiquement recevables. Mais il est hélas de plus en plus difficile de trouver des producteurs prêts à se lancer dans l’aventure, les exploitants leur savonnant bien la planche au passage. Nous, on rêverait de faire toute notre carrière en France, un peu à la façon d’un Chabrol version horreur. Mais si nous n’avons pas le choix, on ira là où l’on veut bien de nous…

J'ai cru comprendre dans le dossier de presse et dans le making of que vous revendiquiez l'influence d'Argento. En regardant Livide, je me disais qu'il y avait quelque chose de très « ean Rollin» dans votre film...Ce qui est loin d'être un critique... Quelles sont donc vos influences les plus secrètes ?

Effectivement, quelques personnes ont trouvés qu'il y avait dans Livide des ambiances qui leur ont fait penser au cinéma de Jean Rollin. Pour être tout à fait honnête, on ne l'a jamais pris comme référence parce que notre film est quand même très éloigné de son travail, ne serait-ce qu'en terme d'action et de rythme. Et à part l'amour des paysages gothique et des bords de mer, on ne voit pas trop de points de convergence. Maintenant, si il y a des fans de Rollin qui n'ont pas vu Livide, je préfère les prévenir qu'ils risquent d'être déçu, ils ne verront pas de jeunes filles nues sous un voile de tulle errer dans la lande !
Nos vraies influences se situent plus du côté de la folie baroque de Suspiria, de l'ambiance générale de Fog et plus largement des films fantastiques des années 60-70, ceux de la Hammer en tête !

Si il y avait une chose que vous pourriez encore changer à Livide, qu'est que ce serait ? 

Je ne sais pas s’il y a un réalisateur sur terre qui n'ait pas envie de modifier son film jusqu'à la dernière minute donc oui, il y a quelques trucs que l'on aurait envie de refaire. Mais plus que tout, ce qui nous a manqué, c'est du temps. Avec un peu plus de confort à ce niveau, on aurait pu peaufiner quelques scènes comme le final par exemple.
Mais nous sommes très fiers du film à l'arrivée ! Compte-tenu des conditions de tournage, on a réussi à faire un film généreux et qui fait beaucoup plus riche qu'il ne l'est !
Les spectateurs n'ont pas à savoir qu'on a eu un budget sérré, peu de jours de tournage, une seule caméra etc... ce qui compte, c'est le résultat final et il ressemble beaucoup au film que l'on avait en tête !

Après Livide, qu'est-ce qui traine dans les cartons de Maury et Bustillo ? Vous pouvez tout nous dire, on ne le publiera que sur Internet ;)
Il y a pleins de choses dans nos cartons mais il est encore un peu tôt pour en parler !
Comme après A l'intérieur, on reçoit pas mal de propositions d'Hollywood mais rien qui ne nous ait vraiment emballé pour l'instant. Après, on a toujours manifestés notre désir de rester en France autant que possible donc on a surtout des projets ici. On a plusieurs scénarios que l'on a écrit qui sont à l'étude en ce moment mais tout est beaucoup plus compliqué en France pour le cinéma d'épouvante donc on verra bien lequel part en premier...
Mais quoi qu'il arrive, notre prochain film sera un film de genre !