Slaughter High : Critique et test DVD


Sur les routes du fantastique, le Slasher est un voiture qui trace capot ouvert, mécanique à nue. Ses rouages scénaristiques entraînés par un implacable death count, son goût du code, de la réplique, de l'arabesque sanglante et de la figure imposée... Tout ramène à la définition du cinéma qui nous est cher, à une sorte de cartographie de l'imaginaire dans laquelle les œuvres se succèdent, se répondent, et parfois se moquent jusqu'à l'épuisement. Car il arrive toujours un moment où un genre, un sous genre épuise le vocabulaire cinématographique et situationnel d'une époque. Il est alors alors de bon ton de crier au chant du cygne, à la voiture balai … et se compromettre dans un curieux révisionnisme semi prédictif «Voilà le film qui enterre le genre». Et ta petit sœur, serions-nous tentés de répondre, si le cinéma polymorphe par nature ne se chargeait lui même de remettre régulièrement les pendules à l'heure, d'un doigt tourné vers les cieux. 



Dans cet opéra artistico-génétique, les filiations, descendances, sautent aux yeux, prennent à la gorge. Chaque bobine majeure se voit reliée aux autres par une multitude de maillons pelliculaires …. Et dans la chaîne résultante (qu'il serait bien tentant de qualifier de courant), le placement d'une œuvre reste toujours éminemment discutable. Le cas de Slaughter High semble toutefois faire une certaine unanimité. Un jet strictement exploitatif, une pure resucée, ne revendiquant à priori qu'un seul et unique objectif. Un histoire de cuisine du sauvage, de gastronomie cinéphilique déviante et de tradition. Et en bout de course, l'art de réchauffer les plats. L'absence de prétention de cette production Randall, sa capacité à régurgiter de façon décomplexée les codes du genre et pousser son récit dans la démonstration graphique, en font un effort teen horrofique récréatif et indéniablement sympathique.





Tout commence pour ainsi dire dans les douches des filles. Là où une bande de joyeux petits cons juste échappés d'un «Sous doués passent le bac» décident de faire une très mauvaise blague à l'un de leur camarade. Marty est un brillant étudiant mais un peu niais, persuadé que Caroline Munroe lui fait de l’œil, il se trouve filmé dans le plus simple appareil par une classe hilare. Mais la farce va aller plus loin, et après le sabotage du laboratoire de l'école, notre exhibitionniste malgré lui va être gravement brûlé à l'acide. Quelques années plus tard, notre clique improbable revient sur les lieux du crime pour une soirée de classars. Un étrange personnage portant un masque et une coiffe de bouffon va se charger de l'animation. Les retrouvailles s'annoncent mortelles...

 
Évidemment tout n'est qu'ici courbette, révérences, et récitation, Slaughter High offre les clés de son intrigue en guise d'offrande dès son prologue. Au diable le mystère, l'essentiel est ailleurs dans ce qui est dit sans l'être dans ce croisement finalement logique du Teen Movie et du cinéma d'horreur qu'est le slasher. Deux genres assurant la transgression de surface pour livrer en sous main, délivrer sous le manteau, en douce, une construction suintante de moralisme. Le conte de fée ou la fable cauchemardesque, ici punitive. Il serait sans doute intéressant de poser à terre quelques instants les grilles d'analyses imposées par quelques décennies de presse spécialisée. Comprendre qu'il est au fond pas tant question de (pèle mêle) catarsis, de nourrir nos pulsions de morts, de pied de nez à la pensée bien pensante et par conséquent d'une expression progressiste libertaire mais bien de l'inverse. D'un cinéma profondément, intrinsèquement réactionnaire, jusque dans ses représentations. (Celle de la femme, de l'acte sexuel, de la loi du talion, de la victime qui au fond l'a bien mérité).

Slaughter high, son tueur masqué mais qui aurait pu ne pas l'être, son 1er avril qui aurait pu être un premier mai (Le film fut initialement annoncé sous le titre
April Fool's Day jusqu'à ce que la Paramount ne dégaine son propre Week end de terreur) étire donc ce curieux malentendu sur 90 minutes. Et pour ceux que cette intellectualisation semble vaine, l'effort commun de Mark Ezra (House Trap, chroniqué il y a quelques semaines), George Dugdale et Peter Mackenzie Litten a d'autres arguments en réserve. Caroline Munroe en lycéenne trentenaire, Dick Randall en personne, un sacré catalogue de mise à mort et une copieuse ration d'humour noir annonçant l'inexorable glissement à venir, celui du slasher vers la comédie ( Return to Horror High, Bloody Pom Pom). 

 


Le disque :

L'édition collector estampillé Uncut Movies propose de découvrir Slaughter High dans un master des plus honnêtes au format 1,66. Un seul mixage audio monophonique en version originale est proposé mais des sous titres français sont de la partie. Rayon bonus, un sympathique diaporama accompagne la traditionnelle flopée de bandes annonce éditeur.

Il n'est pas question pour nous de crier au loup, de participer à l'hystérie collective consistant à prophétiser la fin de tout, mais il est désormais difficile de nier une réalité chaque jour un peu plus cuisante. Le cinéma de genre et son quasi dernier canal de distribution, la vidéo, traversent une mauvaise passe. Dommage collatéral positif d'une dématérialisation en cours, le cinéma fou est aussi devenu un niche faite d'éditeurs passionnés et de collectionneurs compulsifs. Un marché fait de petites éditions collector jusqu'à la moelle, torchées à 500 ou 1000 exemplaires. Un équilibre fragile où le succès d'une galette conditionne l’existence de la suivante. Aussi nous vous invitions plus que jamais à soutenir ces courageux acteurs. 


Slaughter High est disponible au prix de 19€95 sur le site d'uncut : http://www.uncutmovies.fr/