Accrochez-vous à vos slips ! En avril, l'éditeur émérite Artus films se
frotte pour la première fois au «Ciné Fumetto» avec
un objet délicieusement collector regroupant le «Satanik" de
Piero Vivarelli et le livre «Super héros, super vilains»
du grand Alain Petit. Une galette et 64 pages de bonheur qui valent assurément le braquage de tirelire. Ecranbis.com a sorti sa plus
belle cagoule pour livrer ses plus criminelles
impressions.
Attention ça commence plutôt fort ! Le
docteur Bannister, Marnie de son prénom, fleur fanée aux pétales flétris, trimbale sa scoliose sous une pluie battante. Nous sommes en
1968, la couguar, vieille bique fatale n'est pas encore à la mode et
même les taxis l'évitent de peur de se salir le pare-choc ! "Fait chier !"
se dit l'ancienne en courant, ventre et surtout miches à terre (une
simple question de gravité et de temps qui passe) dans le premier
laboratoire venu. Ça tombe bien, on y expérimente dans le plus
grand secret de quoi prendre sa revanche sur le «Tempus
Fugit», un élixir de jouvence capable de transformer un vieux
clebs décrépi en chiot d'exposition. Bref, c'est pas du Dr Pierre Ricaud ! Aussi Marnie, sa mycose faciale et
ses guibolles arquées ne tardent pas y voir l'opportunité inespérée
de goûter à nouveau aux joies de la fraîcheur et aux tumultes d'une jeunesse dépravée. Un coup de scalpel dans le chimiste du coin et voilà que mémère s'enquille la potion magique cul-sec, puis prend mal (Ciel j'ai un
peu mal au crane !) avant de perdre conscience et d'embrasser goulûment le carrelage.
Au réveil, oh
stupeur, la potion lui a raccourci la jupe et épilé les
gambettes... Et oui, c'est comme ça l'Italie, tandis que chez nos
cousins d'Amérique le Dr Banner se transforme en gros machin vert,
de l'autre côté des Alpes, le Dr Bannister se mue en long bidule
blond, coiffé à la "one again" et maquillé comme un scooter volé. Flûte et re-flûte, le numéro de transformiste a beau être réussi, il s'accompagne
d'effets secondaires pour le moins indésirables. Marnie est devenue
diabolique, que dis-je, satanique en d'autres termes, la blondasse est bombasse mais ce qu'elle est mauvaise ! Telle une cagole bien décidée à profiter
sans retenue aucune des attributs charnels que la bonne mère lui a confié (hééééé ma foi!), notre héroïne s'attaque à la pègre locale.
Et avec un pétard pareil, pas de besoin de Kalachnikov. L'ex-moche règle
ses comptes en tortillant du fion, appelant le coup de 12 (cm ?) d'un œil (et non d'un pied) de biche ! Sa perfidie soudaine la conduit d'ailleurs dans toutes sortes de sales
draps où elle expérimentera, en sueur, les limites de la science.
Sa potion miracle, comme un déodorant premier prix, peine à masquer
la réalité sur la durée... Les amants découvrant la fesse cachée
de la mondaine le paieront de leur vie.
L'Italie, terre de recyclage et d'appropriation fut traversée dans les sacro-saintes sixties d'un courant
soudain et éphémère. Un sous genre puisant son inspiration dans la
bande dessinée populaire et locale, mais également dans le film
d'espionnage, les exploits ou méfaits des super hommes américains
et la grande tradition des «Génies du crime» dont "Fantomas",
qu'il s'agisse du personnage initialement créé par Pierre
Souvestre et Marcel
Allain ou celui porté à l'écran façon comédie policière et pop
dans la trilogie de André Hunebelle, est sans doute l'un des
exemples les plus... comment dire... Ricanant ! En d'autres termes, notre "Satanik" du
jour, tout comme "Kriminal" ou "Diabolik" avant lui, est avant toute chose la résultante d'un brassage opportuniste, le produit «Pop» d'une époque
elle même «Pop». Un ADN qui, aujourd'hui encore, rend la
définition de la pirouette cinématographique complexe. Satanik est-il un film de super
héros négatifs ? Un film d'espionnage ? Un polar coquinoux
ou encore autre chose ?
Laissons donc aux snobs du cinéma
Bis les joies de l’étiquetage et de l'analyse nanardo-bobo.
"Satanik", en œuvre radicalement populaire est une œuvre définitivement frontale, fatalement plus
graphique qu'intellectuelle, plus naïve que second degré. Il n'est
certes pas interdit de savourer la touche désormais subtilement Kitsh qui
l'habille, mais je serais fort peiné que le plaisir procuré par ces
quelques 80 minutes puisse se borner à la moquerie et aux sarcasmes.
La question n'est donc plus forcement de savoir de quel coup de vieux
ce «Satanik» a pu être l'innocente victime mais bel et bien de
savoir si nous avons suffisamment bien vieilli pour entrer sans
arrières pensées dans cette aventurette délicieuse. Avec une âme
d'enfant, ou plutôt d'adolescent, pour la pudeur très relative de
son actrice principale qui d'après la légende partagea (Ouh la
vilaine) la couche de Sean «James Bond» Connery. Comme quoi tout cela a beau être du cinéma, la coquine en question n'en a pas que l'air... Elle connaît aussi les paroles. Enfin je m'égare.
Au delà sa nature de spectacle
charmant au goût bubble gum, Satanik c'est surtout l'exposition
d'une Miss "je kill" et d'une docteur Hideuse, une variation sur le
thème très psychanalytique voire allégorique du roman de Robert
Louis Stevenson, concept qui a d'ailleurs servi de creuset à
une partie de la mythologie «Super Héroïque» made in USA. Indispensable expression graphique et rituelle du
passage de normalité à l'extra-ordinaire, la panoplie, le masque
sont ici plus le sex appeal de Marnie Bannister que la vulgaire et
sombre cagoule que Magda Konopka ne revêt que lors d'une scène de
strip tease tombant comme un cheveux sur la croupe. A moins qu'il
s'agisse de signifier à ceux qui seraient passés, pauvres brebis
égarées, à côté de l'évidence. Satanik est définitivement plus une
transposition féminine que féministe du super vilain. Et c'est d'ailleurs mieux comme ça !
Le disque :
Édition De Luxe en provenance d'Artus films ! Un digipack somptueux délivrant "Satanik" dans une belle copie en flat accompagnée de pistes françaises et italiennes. Des sous-titre français font également partie de la tournée. (A la votre !) Dans la cave aux suppléments : Un entretien avec l'acteur Luigi Montini (Danger Diabolik), un diaporama d'affiches et de photos, des bandes-annonces et une présentation fort documentée des "Génies du crime dans le cinéma populaire européen" par le tout aussi sympathique Eric Peretti. Saluons-le car il le mérite.
Pour prolonger le plaisir, l'édition embarque un livre de 64 pages titré "Super Héros, super vilains". Un indispensable complément signé par la main d'Alain Petit. 18€90 et le sourire de la crémière en sus (attention cependant, chez Artus, les crémières ont du poil aux pattes). A commander dans ce coin du web: http://www.artusfilms.com/satanik