La planète des hommes perdus : Critique et test DVD


«La planète des hommes perdus». Non ! Il ne s'agit nullement d'un film d'anticipation produit par Eric Zemmour en hommage à Caroline Fourest (qui porte décidément bien mal son nom). Mais bien du troisième et (préparez les mouchoirs) dernier voyage galactique offert ce mois-ci par Artus films dans sa naissante collection «SF Vintage». Une cartographie des étoiles explorées par le cinéma fantastique des années 60, qui espérons-le perdura dans ces temps de moins en moins propices à l'édition vidéo. Au programme, de la science fiction transalpine, Guiliano Gemma de passage dans le cadre et Anthony Dawson (Antonio Margeriti) aux commandes. Le tout encapsulé dans un digipak beau comme un astre ! Ecranbis.com bombarde la chose d'un review météorique !


Touche à tout magnifique, le bel Antonio passe à la réalisation au tout début des années 60. Il saute de la science fiction au péplum, du péplum au fantastico gothique, du gothique au western, en passant par le film d'espionnage ou l'aventure. Il deviendra même l'un des rares cinéastes italiens à obtenir une aura internationale. Et ce, au point de collaborer directement avec les studios américains, pour le meilleur comme pour le pire, et parfois les deux à la fois. (Il mondo Di Yor, L'invasion des Piranhas). Quoiqu'il en soit, sa filmographie riche de 57 bobines a des airs de pochette surprise pour tout cinéphage un tant soit peu éduqué. Grand amateur d'effets spéciaux et bricoleur de génie, il débute logiquement dans un genre visuellement exigeant, celui de la science fiction avec avec «Space Men» (Assignment Outer Space) et poursuivra l'année suivante avec notre «Il pianeta degli uomini spenti» du jour...


...qui débute à la fin de l'été, sur île au bord de l'eau (oui je sais c'est un peu le concept de l'île, mais pensez que certains lecteurs d'Allociné se perdent sur ces pages de temps à autre et chez Ecranbis.com on pense à tout le monde). Eve court, culotte au vent au bord des falaises pour se jeter dans les bras du beau docteur Fred Steele. Dans quelques heures, le jeune et ténébreux scientifique abandonnera la monotonie d'un observatoire d'astronomie pour voler, la nymphe à son cou, vers une nouvelle vie pleine de promesses. Mais, une inquiétante découverte va bouleverser leur plan sur la comète. Les mesures radars sont formelles, une masse d'origine inconnue se dirige vers la planète bleue. La collision semble inévitable, l'attente interminable. Au cœur du laboratoire, les scientifiques font de l'huile, madame Collins (Jacqueline Derval) fait du café, ils en feront d'ailleurs tout le film.


Dans ses quartiers, entre deux travaux botaniques, le professeur Benson, savant un tantinet excentrique, élabore de toutes autres théories. D'après d'ésotériques calculs, gribouillés à même le pot de fleurs, la Terre ne figurerait nullement sur la feuille de route du caillou cosmique. Le vieux fou ne se trompe d'ailleurs qu'à moitié. Le roc géant ralentit sa course pour sagement se placer en orbite. L'humanité respire ! Mais sur le plancher des vaches, l'apparition de ce nouveau satellite a de bien désastreuses conséquences. Les volcans vomissent des flammes, la panique s'installe dans les villes, Ginger Lynn relance, la cinquantaine passée sa carrière dans le X, Emmanuel Vals devient premier ministre. L’envoi d'une mission d'exploration ne fera que noircir le tableau.

Quelques dizaines de soucoupes volantes s'échappent de l’astéroïde pour briser en trois coups de rayon laser le fragile espoir d'une humanité au bord du gouffre. Mais l'étude d'un OVNI fraîchement tombé des cieux va toutefois dégager quelques perspectives. Seize ans avant François Truffaut, Claude Rains (le Professeur Benson) pense pouvoir entrer en communication avec les envahisseurs grâce à un langage présumé universel: La musique. Il parvient même à convaincre les autorités militaires de la nécessité d'une étude du météore avant sa destruction...


La rencontre du troisième type se joue traditionnellement comme un match de football, à domicile ou à l’extérieur. «La planètes des hommes perdus» a la qualité de placer son script dans l’entre deux. Dit autrement si l'effort d'Antonio Margueriti embarque bel et bien quelques scènes d'exploration carabinées, l'essentiel de son récit garde les pieds sur terre. Nous n'avons donc pas vraiment à faire à un space opera, ni même un film d'invasion extra-terrestre. Aucun visiteur cosmique ne montrera ici le bout d'un tentacule. Sacrifiée sur l'autel d'un budget rachitique, cette populace fuyant sa planète d'origine passera de l'autre côté du miroir avant même de pénétrer notre galaxie et de noircir une page de script.

Entre une paire de plan SFX répétés à l'infini, Margueriti parvient à placer deux amourettes, un running gag (une vague histoire de briquets) et de quoi satisfaire tout amateur de sérial... En particulier dans sa toute dernière partie, au cœur de l’astéroïde, face à une intelligence artificielle en roue libre. Sublime conclusion laissant le jusqu'au-boutisme scientifique rejoindre les berges de la folie...


Bien sûr oui bien sûr, l’intérêt de la planètes des hommes perdus ne manquera d'être discuté par l'intelligentsia bisseuse, avec le snobisme d'usage, il va sans dire. Doigt en l'air, à l'odeur suspecte, prose agitée... Signes avant coureur des selles journalistiques nerveuses. Rien à torcher de notre côté du web... Voilà une planète qui a perdu ses locataires mais pas de son charme...

Le disque :

Les petits gars d'Artus livrent cette «Planète des hommes perdus» dans un écrin cartonné aux visuels délicieux. L'effort d'Antonio nous parvient dans une belle copie en flat (Master16/9) accompagnée de pistes italienne et française (sous titres français optionnels). Pour le même prix, bandes annonces et diaporama de photos et d'affiches vous attendent. Le tout est complété par la traditionnelle mais incontournable présentation du film par l'excellent Alain Petit. 13€90 prix terrestre... (Mais l'éditeur me fait savoir qu'il livrera dans toute la galaxie).