Après un long voyage dans la galaxie
Bis, le vaisseau d'Artus films se pose à nouveau sur la planète
science fiction. Dit autrement: Trois galettes furieuses et volantes
traverseront ce mois-ci les cieux vidéastiques français: «La
planète des hommes perdus» d'Antonio Margueriti, «La planète des
tempêtes» de Pavel Klushantsev et notre astre du jour: «La planète
des vampires» de Mario Bava. L'éditeur émérite avertit la foule: Rentrez vos télescopes braves gens ! Une platine DVD et un téléviseur
devraient à priori suffire à observer le phénomène. Les
puristes ayant sans doute déjà refermé leur navigateur pour courir, slip
kangourou à terre, carte bleue en avant jusqu'aux dispensaires les
plus proches, Ecranbis.com s'efforce de convaincre les autres, les
réfractaires et les récalcitrants (Oui toi là devant ton écran
d'ordinateur, je te vois …) par une chronique évidemment
lunaire.
Au milieu des sixties, l' American
International Pictures de James
H. Nicholson et Samuel
Z. Arkoff
vient de faire quelques substantiels bénéfices en distribuant «Le
masque du démon » et «Les 3 visages de la peur»
sur le territoire américain. La firme, spécialisée dans le
spectacle sans le sou, va se retrouver à coproduire un nouveau
Bava avec l'Italian International Film et Castilla Cooperativa
Cinematográfica. Le film est un petit budget, adapté d'une nouvelle
de science fiction italienne, publiée cinq années plus tôt: «One Night of 21 Hours» de
Renato Pestriniero . L'AIP le distribuera en double programme
avec le Lovecraftien "Die,
Monster, Die!» de Daniel Haller.
En France, le film n’apparaîtra que tardivement en VHS puis en
DVD chez Studio Canal dans un disque étrangement retiré de la vente.
Dans le froid glacial du cosmos,
l'Argos et le Galliate, deux croiseurs spatiaux ont mis le cap vers
l'infini. A leur bord, la mode est au sourire retenu et au cuir
moulant. Dans l'espace personne ne vous entendra rire ou ne respirera
vos dessous de bras. Sur leur route vers l'inconnu, nos deux
coquilles de noix perdues dans le vide interstellaire et leurs
équipages respectifs, perçoivent un étrange signal, émis depuis
la planète Aura. Les manœuvres d'approche sont enclenchées et les
instructions du haut commandement retentissent jusque dans les
coursives. «La vitesse de gravitation sera maintenue à la force G7
jusqu'au dernier moment. Synchronisez l'éjecteur de Mega. Contrôle électro-magnétique. Mettre en place le plan F71. Supprimez les
coordonnées X, Y, Z». On croirait entendre Michel Sapin ! Notre petit monde entré
dans l'atmosphère d'Aura, une force mystérieuse prend le contrôle
des appareils. Et à peine tombés du ciel, et leur pieds posés sur l'astre fumant, les
survivants de l'Argos sont pris de bouffées délirantes. On strangule
à droite, on assomme à gauche.
Fort heureusement, le
capitaine Mark Markary n'officie pas pour Costa Croisière. Au lieu de quitter le navire, il parvient, en bon berger des étoiles, à ramener
ses brebis à la raison. Les multiples avaries subies durant le crash
empêchant un redécollage immédiat, tous les espoirs de se tournent
vers la carcasse du Galliate, écrasée à quelques rochers de là.
Mais la chance se refuse obstinément à nos Robinsons qui découvrent que les membres de l'autre équipage se
sont entre-tués. Dans leur exploration de la brumeuse Aura, Markary et
la jolie Sonia tombent également sur l'épave d'un engin
extraterrestre et les corps momifiés de créatures géantes. Il
semble désormais clair que les spationautes ne sont pas les
premières victime de la brouillardeuse planète et de ses habitants, entités
immatérielles, capable de prendre possession des corps des voyageurs
de passage.
Une fois n'est pas coutume, me voilà
quelque peu agacé au moment de saisir la plume, aussi numérique
soit-elle, et d'étaler sur la papier (ou presque), mes impressions
post visionnage. Ne vous méprenez pas, il n'est pour moi nullement
question de discuter l’intérêt du métrage de Mario Bava ou de
cette très belle édition, mais bien de m'interroger sur la
nécessité de me répandre trois paragraphes durant sur ce que tout
le monde sait déjà. J'ai donc décidé de couper la poire en deux.
Faites moi cadeau d'une présentation en grande pompe de l’œuvre
de Bava et en échange, je me résoudrai à vous dire: O combien
l'Alien de monsieur Scott et du docteur Dan O'Bannon louche sans gène
sur «La planète des vampires» et ce quelques soient les alibis
déclarés des prévenus précités. (On ne l'a pas vu, mon cul !).
Jugez sur pièces : SOS cosmique, fréquences se perdant dans l'infini, reçues en plein casque pas une
bande de cosmotouristes. Atterrissage un peu forcé, découverte de
«trucs» extra desséchés et pas trop terrestres... La
tente est plantée.
Mais ne comptez pas sur Ecranbis.com pour crier à la resucée, à
la repompe. Le recyclage thématique, visuel n'est-il pas en effet
une composante essentielle du cinéma qui nous est cher. Bis ?
Vous avez dit Bis ? Et l'on pourrait tout aussi bien concéder,
que «Planet of the Vampires» pioche sans plus de retenue dans les scripts de
«Forbidden planet» ou encore d'«Invasion of the Body
Snatcher».
Sans surprises, le résultat est à la hauteur du maigre pécule mis à
la disposition du cinéaste italien. Comprenez par là que «La
planète des Vampires» n'échappe nullement à sa condition de
B movie. Mais, armé d'un indiscutable sens de la
bricole, Bava noie son récit dans les fumigènes, quelques rochers en
carton (toujours les mêmes) traversent le cadre, on joue du trompe l’œil et de la peinture sur vitre (Voir l’excellent documentaire «Les
Trucages de la planète des vampires» embarqué sur la
galette). Le tout baignant dans un océan de couleur en fusion.
Le propos embrasse lui l'aventure épique, le récit exploratif Vernien et le "Robinson" de Defoe. Une île, les profondeurs de la terre ou de l'espace, peu importe le naufrage, pourvu que l'inconnu offre un terrain de jeu à l'imaginaire. Mais qu'on se le dise "La planète des vampires" est aussi, surtout un véritable film d'horreur. Un quasi gothique dans l'espace. Au centre du radar : l'alienation, le pendant "science fictionnel" de la possession démoniaque. Un mal que les cinéphiles ont croisé dès les années 50 dans le cinéma SF américain (L'invasion des profanateurs de sépultures, le maccarthisme en moins). Quant
aux vampires promis par le titre américain (dont le pendant
français tient de la traduction littérale), ils brillent, tout
comme dans un autre Bava, Hercules contres les vampires, surtout par leur absence. Il est en
effet ici question de mort vivants ou plus exactement
d'enveloppes charnelles sous influence. Cette petite tromperie mise à part, rien à jeter ! Les fantasticovores amateurs de bonbons sixties
pour les yeux, de look improbables et d'échange de tirades technico-ésotériques seront à
coup sur sous le charme. L'abduction de quelques 13€90 de vos portefeuilles est vivement recommandée.
Le disque :
Artus films fait un carton !
Tout comme pour l'édition «Satanik», le film culte de Mario Bava
nous arrive dans un beau digipack qui en s'ouvrant, expose avec
classe, deux affiches originales italiennes (pour les puristes). La planète des vampires
est présentée dans une copie de toute beauté au format 1.85 (Master
16/9), accompagnée par des mixages français et italiens
(sous-titres français disponibles). Dans la soute à suppléments, pas de lézard, ni d'alien mais un
documentaire des plus instructifs sur les effets spéciaux (Par le
professeur Pierpoljakos), un diaporama, des bandes annonces et
l'indispensable présentation d'un Mr Alain Petit, toujours aussi passionnant. 13€90 à commander sur la planète web d'Artusfilms.